Mamadi Camara témoigne du jour où il a été arrêté à tort pour une attaque sur un policier

Dans sa déclaration d’ouverture au jury, la procureure de la Couronne a déclaré que le policier avait identifié erronément Mamadi Camara comme son agresseur car il était la dernière personne qu’il avait vue avant de se faire assener des coups de barre de métal sur la tête.
Valérian Mazataud Le Devoir Dans sa déclaration d’ouverture au jury, la procureure de la Couronne a déclaré que le policier avait identifié erronément Mamadi Camara comme son agresseur car il était la dernière personne qu’il avait vue avant de se faire assener des coups de barre de métal sur la tête.

Mamadi Fara III Camara, initialement accusé — puis complètement blanchi — d’avoir attaqué et tiré sur un policier en janvier 2021, a témoigné lundi au procès criminel de celui qui fait désormais face à ces accusations. Il y a relaté ce qu’il a vu de l’agression brutale et comment c’est lui qui a alerté les policiers de ce qui venait d’arriver à leur collègue.

« Il y a eu un coup de feu ! Il y a quelqu’un qui a tiré » l’entend-on dire à la répartitrice du 911, lors d’un appel téléphonique qui a été déposé en preuve. Un policier a été attaqué, lui précise-t-il.

M. Camara a été appelé à la barre des témoins par la Couronne et a livré son récit toute la journée de lundi au palais de justice de Montréal.

Le jury a pu y entendre l’appel au 911, qui a été déposé en preuve.

C’est M. Camara qui a appelé les services d’urgence le 28 janvier 2021, en fin d’après-midi, quand l’agent du Service de police de la ville de Montréal (SPVM), Sanjay Vig, a été attaqué. Lui-même venait d’être intercepté par ce même policier pour avoir supposément utilisé son téléphone cellulaire au volant.

L’homme de 34 ans, un ingénieur électrique, attendait son constat d’infraction dans sa voiture quand il a soudainement entendu deux personnes au sol en train de se battre.

Le policier demandait de l’aide, a-t-il relaté au procès d’Ali Ngarukiye, accusé de voies de fait sur le policier, de l’avoir désarmé et d’avoir tiré sur lui. Il avait vu le policier se sauver et un homme courir après lui.

D’une façon très polie, on entend M. Camara demander de l’aide au 911 pour le policier. Des renforts sont arrivés, noyant avec leur bruit de sirènes l’échange téléphonique, y mettant fin. Il a alors volontairement donné son nom à la répartitrice.

Après avoir appelé le 911, M. Camara s’est fait dire par un policier arrivé sur les lieux qu’il pouvait rentrer chez lui et qu’il recevrait son constat par la poste. Mais il n’a pas eu le temps, a-t-il relaté lundi matin au juge François Dadour de la Cour supérieure. Un policier l’a intercepté à nouveau alors qu’il se dirigeait à pied vers sa demeure : il lui a dit qu’il ne pouvait pas rentrer. M. Camara a expliqué au juge qu’il est alors retourné dans sa voiture et que le policier, en regardant sa plaque d’immatriculation a crié : « On a notre gars ! On a notre gars ! »

« Puis plusieurs policiers sont venus et ont pointé leur arme sur moi. » Il leur a lancé : « Ce n’est pas moi ! Je n’ai rien fait ! »

Il a passé six jours en détention avant d’être relâché. Les accusations déposées contre lui ont ensuite été retirées.

Dans sa déclaration d’ouverture au jury, la procureure de la Couronne, Me Jasmine Guillaume, a déclaré que le policier Vig avait identifié erronément M. Camara comme son agresseur car il était la dernière personne qu’il avait vue avant de se faire assener des coups de barre de métal sur la tête. De plus, les deux hommes se ressemblent, a-t-elle avancé vendredi dernier.

S’ils sont tous les deux Noirs et sveltes, M. Camara a déclaré lundi qu’Ali Ngarukiye est « plus grand et plus gros que moi » et que sa peau est plus foncée que la sienne.

Ali Ngarukiye a écouté le témoignage depuis le box des accusés, entièrement entouré de murs vitrés dans cette salle du palais de justice de Montréal. Quant à M. Camara, il a été contre-interrogé tout l’après-midi par l’avocate de l’accusé, Me Sharon Sandiford. Le procès doit durer encore trois mois.

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