Le transport collectif, un poids plume dans le budget de Lévis

« On commence vraiment à très, très bien se positionner », croit le maire, Gilles Lehouillier, qui insiste sur l’augmentation des sommes consenties au transport collectif observées depuis 2012.
Photo: Renaud Philippe Le Devoir « On commence vraiment à très, très bien se positionner », croit le maire, Gilles Lehouillier, qui insiste sur l’augmentation des sommes consenties au transport collectif observées depuis 2012.

Pendant qu’elle jette son dévolu dans la réalisation d’un troisième lien évalué en milliards, la Ville de Lévis ne consacre, dans le budget de 333 millions de dollars présenté lundi, que 13,3 millions au transport en commun offert à ses 149 000 habitants.

La Ville a presque doublé, en 10 ans, le budget de fonctionnement de son transport collectif, qui plafonnait à 6,4 millions de dollars en 2012. Malgré cet effort, Lévis dédie à peine 4 % de son budget 2022 au transport en commun, une réalité qui relègue la Ville au rang de poids plume, à ce chapitre, en comparaison à d’autres municipalités.

En 2020, par exemple, Québec consacrait 124 millions de dollars au Réseau de transport de la Capitale ; Longueuil, 93 millions de dollars à la Société de transport de Longueuil et Gatineau, 69 millions de dollars à la Société de transport de l’Outaouais.

Parmi les 10 plus grandes villes du Québec, Lévis arrive au septième rang des sommes récurrentes consacrées au transport en commun. La Ville investissait moins de 85 $ par habitant à ce chapitre en 2020, soit 26 $ de plus qu’à Trois-Rivières et 27 cents de plus que Saguenay (84,67 $), mais 10 $ de moins que Sherbrooke.

« Il n’y a pas si longtemps, on était au dernier rang », souligne le maire de Lévis, Gilles Lehouillier. « Maintenant, parmi les quatre villes comparables, on est deuxième. Ce n’est pas une victoire, mais c’est un pas dans la bonne direction. »

Saguenay, Sherbrooke et Trois-Rivières, cependant, ne font pas face à une ville de la taille de Québec, une situation propre à Lévis qui mène plus de 175 000 automobiles à emprunter quotidiennement les ponts de Québec et Pierre-Laporte, selon les données du Ministère des Transports.

Gilles Lehouillier défend la nécessité de creuser un tunnel routier entre sa ville et la capitale pour assurer la fluidité des transports entre les deux rives. Les deux premiers liens, a-t-il répété à plusieurs reprises, ne suffisent plus devant la croissance démographique de la région.

Le maire de Lévis craint qu’une augmentation trop importante des sommes allouées au transport en commun affecte le compte de taxes des contribuables. Le taux global de taxation de la Ville est de loin le plus bas parmi les villes comparables. Si Lévis taxait ses citoyens au taux moyen, elle irait chercher 48,2 millions de dollars supplémentaires, chaque année.

À titre d’exemple, présentement, la somme dédiée au transport collectif en 2022 est légèrement supérieure aux 12,2 millions de dollars que Lévis entend consacrer à l’aménagement de locaux de musique et de danse dans son centre culturel.

Pendant que Québec investit comme jamais dans son histoire pour concrétiser son tramway, épine dorsale de son plan de mobilité durable, Lévis entend injecter 27 millions de dollars, au cours des trois prochaines années, pour ajouter des voies réservées au transport en commun le long de son boulevard urbain.

D’ici 10 ans, la Ville a l’objectif d’électrifier ses autobus, au prix de 136 millions de dollars. Cette mesure constitue la pièce maîtresse de ses investissements prévus jusqu’en 2030 en matière de transport collectif.

« On commence vraiment à très, très bien se positionner », croit le maire Lehouillier, qui insiste sur l’augmentation des sommes consenties au transport collectif observées depuis 2012.

Une ville bleue

 

Lévis se verdit par d’autres moyens, notamment en redonnant l’accès du Saint-Laurent à ses citoyens. Au cours de la prochaine année, la Ville entend acquérir des terrains situés le long du littoral à l’ouest des ponts, dans un secteur, Saint-Nicolas, où le fleuve est peu accessible au public.

À terme, ce parc urbain devrait atteindre plus de 73 000 m2, soit quatre fois la superficie du quai Paquet, porte d’entrée fluviale de la Ville où les traversiers venus de Québec viennent amarrer et les familles, s’amuser dans les jeux d’eau.

Lévis met aussi en place sa politique zéro déchet, qui vise à étendre son programme de compostage aux entreprises, aux industries et aux milieux institutionnels. Le budget 2022 prévoit la création d’un fonds vert doté d’un million de dollars, destiné notamment à recenser les boisés de grande valeur sur le territoire de la Ville.

Une canopée sous pression

 

Ces boisés sont de plus en plus menacés par le développement de Lévis. Depuis 2018, la Ville revendique année après année des records de croissance, qui se traduisent par la valeur toujours en hausse des permis de construction octroyée.

La Ville de Lévis dépend de plus en plus de cette expansion pour assurer ses revenus. Les taxes représentent, dans le budget 2022, 85,6 % de son budget de 333 millions de dollars.

Les taxes, pour l’année à venir, augmenteront en moyenne de 2,5 %.

La Ville de Lévis entame une vaste réflexion sur l’organisation du travail au sein de sa fonction publique. Le télétravail lui a imposé un constat : les locaux d’autrefois ne seront plus nécessaires à l’avenir et pour attirer de la main-d’œuvre malgré la pénurie, Lévis doit s’adapter.

Réinventer l’organisation du travail

Au cours des trois prochaines années, la Ville entend consacrer 6,4 millions de dollars pour revoir ses pratiques et pour adapter ses bureaux administratifs, qui totalisent une superficie de 120 000 pi2 sans compter les casernes, les postes de police, les bibliothèques ni les garages.

À terme, la Ville n’exclut pas de vendre des bâtiments. « En gestionnaires des derniers publics, nous ne pouvons pas dépenser pour entretenir des actifs inutilisés », indique le directeur adjoint au développement durable, Dominic Deslauriers.

L’aménagement de bureaux partagés est dans les cartons.

« Les gens qui ont pris l’habitude de travailler trois jours de la maison, ils ne veulent pas revenir au bureau et vivre la même expérience qu’avant », souligne M. Deslauriers. « Ils ne veulent pas retrouver des espaces fermés qui les isolent des autres. »

Pour Lévis, une ville doit s’adapter aux nouvelles réalités du travail pour attirer la main-d’œuvre, d’autant plus que celle-ci s’annonce rare encore longtemps.

Une première opposition en quatre ans

Le dépôt du budget a marqué l’entrée en scène du seul élu de l’opposition au conseil municipal de Lévis. Après avoir été élu à 92 % et régné sans partage sur la Ville pendant 4 ans, Gilles Lehouillier avait devant lui un élu d’une autre formation que la sienne.

 

Serge Bonin a fustigé un manque d’informations qui l’ont empêché, selon lui, de prendre connaissance du budget et de rencontrer le vérificateur général.

 

« Je me sens, en tant qu’élu, exclu de la démarche », a avancé l’élu de l’opposition. « Je suis incapable de dire si la Ville est en bonne santé et en piètre état. »

 

Le ton a rapidement monté.

 

« Vous pouvez dire n’importe quoi mais il faut remettre ça dans le contexte », a répliqué M. Lehouillier, soulignant que le manque d’accessibilité du vérificateur général était dû à la pandémie.

 

Le maire a ensuite rabroué son opposant, l’accusant de ne pas avoir posé ses questions quand il en avait l’occasion et d’avoir voulu créer un effet de toge.

 

« Je comprends que vous vouliez faire votre show ce soir », a dit celui qui entame un troisième mandat. « Bon show, mais c’est complètement déphasé. »



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