Les députés conservateurs sommés de garder le silence sur les enjeux LGBTQ+

Le chef conservateur Pierre Poilievre parle à un journaliste à l’entrée du bloc ouest du Parlement à Ottawa, lundi.
Sean Kilpatrick La Presse canadienne Le chef conservateur Pierre Poilievre parle à un journaliste à l’entrée du bloc ouest du Parlement à Ottawa, lundi.

Les députés conservateurs ont reçu pour consigne de ne pas commenter, sur les réseaux sociaux ou dans les médias, les manifestations concurrentes portant sur la manière dont les écoles devraient gérer les questions LGBTQ+.

La Presse canadienne a obtenu une copie du message envoyé aux membres du caucus de Pierre Poilievre, qui les avertissait de ne pas parler publiquement de la question et leur fournissait des éléments de discussion qu’ils pourraient utiliser pour communiquer avec leurs électeurs.

Il est courant que le bureau du chef de l’opposition propose des éléments de discussion sur des questions importantes, comme il l’a fait sur la réforme du système canadien de mise en liberté sous caution et l’inflation.

Le bureau de M. Poilievre n’a pas répondu à une demande de commentaires, notamment sur la consigne explicite selon laquelle les députés ne devaient pas parler aux médias de cet enjeu précis.

La note sur les manifestations organisées partout au Canada affirme que les manifestants ont des « arguments légitimes à faire valoir » sur la question de ce qu’elle décrit comme « les droits parentaux ».

Des milliers de personnes se sont rassemblées dans plusieurs villes à travers le pays pour des manifestations concurrentes, scandant des slogans sur la manière dont les écoles enseignent la sexualité et l’identité de genre et sur la manière dont les enseignants font référence aux jeunes transgenres.

Le débat que manifestants et contre-manifestants ont suscité mercredi dans les rues du Canada a pris de l’ampleur ces derniers mois en raison des nouvelles politiques mises en oeuvre dans deux provinces.

Le Nouveau-Brunswick et la Saskatchewan ont adopté des politiques éducatives selon lesquelles les écoles doivent obtenir le consentement d’un parent si un élève de moins de 16 ans souhaite être appelé par un nom ou un pronom différent que celui que lui ont donné ses parents.

Ces deux politiques font désormais l’objet de contestations judiciaires.

Le premier ministre de la Saskatchewan, Scott Moe, s’est dit prêt à utiliser la clause dérogatoire pour maintenir la politique en place face aux préoccupations des critiques, des défenseurs des droits des membres de la communauté LGBTQ+ et de la protectrice des enfants de sa province, qui soutiennent qu’elle constitue une discrimination à l’égard des droits des élèves transgenres et non binaires.

Pour sa part, M. Poilievre n’a abordé la question que lorsqu’on l’a interrogé à ce sujet.

Après que le premier ministre Justin Trudeau a dénoncé la politique du Nouveau-Brunswick cet été, M. Poilievre a déclaré aux journalistes de la province que M. Trudeau devrait rester à l’écart des affaires du gouvernement provincial et « laisser les parents élever leurs enfants ».

Le bureau de M. Poilievre a réitéré cette remarque dans le message de mercredi et a suggéré aux députés de la répéter « pour communiquer avec leurs électeurs sur la question des droits parentaux ».

M. Poilievre a également déclaré, sur les ondes radio d’un média ethnique et avant les manifestations de mercredi, qu’à son avis « les parents devraient être l’autorité finale sur les valeurs et les leçons à enseigner aux enfants ».

La note commençait par un texte en gras : « Ce message est destiné à un usage en cas de réaction uniquement. Veuillez ne pas parler aux médias ni publier sur les réseaux sociaux à propos de cet enjeu. »

La Presse canadienne n’a vu aucun membre du caucus assister aux manifestations devant la colline du Parlement.

En réponse aux manifestations, M. Trudeau a publié un message sur X, mercredi, indiquant que « la transphobie, l’homophobie et la biphobie n’ont pas leur place dans ce pays » et qu’il soutient la communauté LGBTQ+.

Le chef du NPD, Jagmeet Singh, a également été observé en train d’assister à une contre-manifestation à Ottawa.

Les conservateurs en bonne posture

Depuis qu’il est devenu chef, M. Poilievre a essayé d’amener le parti à se concentrer sur les questions de coût de la vie et du prix de l’immobilier.

Les sondages successifs de l’été qui montrent que les conservateurs ont une bonne avance sur les libéraux au pouvoir ont laissé les partisans optimistes et confiants qu’il est sur la bonne voie pour ramener les conservateurs au pouvoir après avoir passé huit ans hors du gouvernement.

Mais les délégués du parti au congrès politique de ce mois-ci à Québec ont également clairement indiqué qu’ils voulaient que le parti se prononce sur les questions culturelles, et pas seulement sur les questions économiques.

Les membres du parti ont voté en faveur de l’inscription d’une nouvelle disposition dans son manuel politique déclarant qu’ils estiment que les femmes ont droit à des « espaces non mixtes » et qu’un futur gouvernement conservateur devrait interdire les interventions médicales et chirurgicales pour les mineurs souffrant de dysphorie de genre.

Ni M. Poilievre ni son bureau n’ont commenté ce qu’il entend faire de ces nouvelles politiques, qui ne sont pas contraignantes.



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