Le casse-tête de réorganiser les services est déjà commencé à Maisonneuve-Rosemont

L’hôpital Maisonneuve-Rosemont devrait se transformer en méga chantier d’ici environ un an, ce qui implique la délocalisation d’une partie de ses services.
Jacques Nadeau Archives Le Devoir L’hôpital Maisonneuve-Rosemont devrait se transformer en méga chantier d’ici environ un an, ce qui implique la délocalisation d’une partie de ses services.

Alors que l’hôpital Maisonneuve-Rosemont devrait se transformer en méga chantier d’ici environ un an, la direction doit mettre en place une importante opération de réorganisation des services. Si l’objectif vise le maintien de tous les services, il faudra mettre à contribution tout le Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) de l’Est-de-l’Île-de-Montréal pour y parvenir.

Au moment de l’annonce du projet, lundi dernier, le ministre de la Santé, Christian Dubé, a évoqué un échéancier de huit à dix ans pour la réalisation des travaux. Puis, dans les documents d’appels d’offres déposés en ligne mardi pour les services d’architecture et d’ingénierie, on mentionne une « date probable de fin du mandat […] en septembre 2037 ».

De toute évidence, il faut s’attendre à une longue cohabitation entre les travailleurs de la construction et ceux de la santé à l’hôpital Maisonneuve-Rosemont (HMR). Afin d’être prêt à accueillir tout le monde, le président-directeur général du CIUSSS, Jean-François Fortin Verreault, dit avoir « déjà commencé à faire de la place ».

Le p.-d.g. qui compte déjà sur l’expérience vécue avec le chantier du Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM) est bien placé pour savoir que le défi « va être exigeant ». Il a insisté sur l’importance de mobiliser les autres points de services du CIUSSS afin de décharger HMR.

Les groupes de médecine familiale (GMF), l’hôpital Santa Cabrini et l’Institut universitaire en santé mentale vont notamment mettre l’épaule à la roue. On souhaite aussi bonifier les services de soins à domicile pour libérer des lits.

« Maintenant, l’hospitalisation en santé mentale se fait à l’Institut universitaire de santé mentale. On a également récemment déplacé une partie des activités d’ophtalmologie, une partie de la chirurgie générale, avec un appel d’offres qui a été fait au privé, a-t-il expliqué. On opère nous-mêmes, dans des locaux privés opérés par nos employés à Angus. »

Cette délocalisation d’une partie des activités a permis de « libérer un volume clinique », a ajouté M. Fortin Verreault, qui prévoit déployer d’autres mesures semblables au cours de la prochaine année.

L’unité des soins palliatifs du pavillon Rosemont devrait être accueillie au Centre d’hébergement et de soins de longue durée (CHSLD) de Saint-Michel. L’Institut universitaire en santé mentale, le centre médical privé et le CHSLD sont tous situés dans un rayon de cinq kilomètres de HMR.

Dans le cas de l’hôpital Santa Cabrini, qui se trouve tout près de Maisonneuve-Rosemont, Québec aurait allongé des fonds pour aménager deux salles d’opération supplémentaires d’ici deux ans.

« On travaille un plan clinique en cohérence pour s’assurer que ça fonctionne. Ça va être exigeant, mais on a des solutions pour y arriver », a assuré le p.-d.g.

Grâce à ce travail de coordination, le ministre Christian Dubé s’est permis d’avancer que des « travaux préparatoires » pourraient commencer dès 2024 dans les installations actuelles.

Bien que très enthousiaste à l’idée de voir l’hôpital se moderniser, le Syndicat des techniciens et professionnels du CIUSSS de l’Est-de-l’Île-de-Montréal, affilié au Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP), entend demeurer aux aguets tout au long des travaux.

« D’ici à sa pleine réalisation, il faudra être vigilants », a prévenu sa présidente Marie-Hélène Brunet par voie de communiqué. Elle veut notamment s’assurer « que la délocalisation temporaire inévitable de soins et de services ait le moins d’impacts négatifs possible ». Elle dit s’inquiéter d’un éventuel « éparpillement de services ».

« Mini-hôpital privé »

L’autre soupape évoquée par le ministre, c’est l’engagement pris par le gouvernement de construire un « mini-hôpital privé » dans l’est de Montréal. Ce projet qualifié par certains de « gros GMF » ou encore de « CLSC privé », a été dénoncé par les défenseurs du réseau public.

La déclaration du ministre a d’ailleurs chatouillé le SCFP. Pour le syndicat, tout cela ressemble à « un prétexte pour privatiser le réseau » de la santé.

Selon le syndicat, une plus grande place accordée au privé viendra « aggraver les problèmes de rétention du personnel » et « siphonner les fonds publics ».

Or, aux yeux du ministre, ce qui compte c’est l’« accès à des services d’urgence » pour les patients. En donnant l’exemple des cliniques exploitées par des infirmières praticiennes spécialisées (IPS), il mentionne que ces autres points de services permettent de réduire la pression sur les unités d’urgence des hôpitaux.

Selon Christian Dubé, un appel d’offres devrait être lancé cet automne en vue de trouver un partenaire privé intéressé à gérer ce nouveau service. Il veut que cette future urgence privée accueille des patients en 2025.

Ce service risque-t-il d’être éphémère et de devenir désuet dans une décennie lorsque les travaux auront été exécutés et qu’on misera sur un nouvel hôpital ultramoderne ? Le ministre en rêve, mais n’y croit pas. Il demeure d’avis que les patients nécessitant des soins, mais dont la condition n’est pas alarmante, auront toujours besoin d’un endroit où aller.

Il souligne qu’environ 50 % de l’achalandage dans les urgences du Québec sont actuellement des cas de priorité 4 ou 5, donc non urgents. Ces patients doivent être redirigés vers des cliniques de médecine familiale, des cliniques d’IPS ou bientôt vers des urgences privées.


Le contenu en santé de La Presse canadienne obtient du financement grâce à un partenariat avec l’Association médicale canadienne. La Presse canadienne est l’unique responsable des choix éditoriaux.

À voir en vidéo