Les enfants en difficulté doublement désavantagés par le système québécois

« Au Québec, tous les enfants n’ont pas accès aux services et au soutien dont ils ont besoin au moment opportun, ce qui les prive d’occasions de développer leur plein potentiel », peut-on lire à la toute première ligne du rapport.
iStock « Au Québec, tous les enfants n’ont pas accès aux services et au soutien dont ils ont besoin au moment opportun, ce qui les prive d’occasions de développer leur plein potentiel », peut-on lire à la toute première ligne du rapport.

L’Observatoire des tout-petits, soutenu par la Fondation Lucie et André Chagnon, a dévoilé mardi un nouveau rapport qui met en lumière la difficulté d’obtenir des services spécialisés en santé et en éducation pour les enfants ayant des besoins particuliers.

Selon le document intitulé Tout-petits ayant besoin de soutien particulier : Comment favoriser leur plein potentiel ?, de nombreux enfants se trouvent à la fois brimés par le manque d’accès aux ressources en santé et par le manque d’accès aux ressources éducatives puisqu’ils n’ont pas d’abord reçu un diagnostic médical.

« Au Québec, tous les enfants n’ont pas accès aux services et au soutien dont ils ont besoin au moment opportun, ce qui les prive d’occasions de développer leur plein potentiel », peut-on lire à la toute première ligne du rapport signé par la directrice de l’observatoire, Fannie Dagenais. Elle ajoute que cette situation viole les droits des enfants ayant des besoins particuliers, puisque cela est contraire au principe de l’égalité des chances.

Selon ce que rapporte l’observatoire, les parents en quête de services particuliers se butent à une multitude d’obstacles. On parle de délais excessifs, de difficultés à obtenir de l’aide financière, ou encore de difficultés à obtenir des services éducatifs spécialisés.

« Les parents, ce qu’ils nous disent, c’est qu’ils font face à un parcours du combattant », mentionne Mme Dagenais. Avant tout, il s’avère complexe de connaître les services existants dont pourrait bénéficier son enfant. Ensuite, il est encore plus difficile d’y avoir accès parce qu’il faut avoir en main un diagnostic confirmant le besoin de l’enfant.

Le hic, c’est qu’il y a de longues listes d’attente pour obtenir ledit diagnostic. « Et une fois qu’on a notre diagnostic, bien on se retrouve sur d’autres listes d’attente pour avoir accès aux différents services dont l’enfant a grand besoin », résume la directrice de l’observatoire.

Mettre les besoins de l’avant

Or, ce manque d’accès à des ressources professionnelles peut avoir d’importantes conséquences sur le développement des enfants, puisque la période de 0 à 5 ans est cruciale dans leur développement. Certains peuvent donc souffrir de ne pas avoir obtenu de soutien sur le plan langagier, moteur ou cognitif en temps opportun.

« Le fait de ne pas pouvoir agir tôt, cela nous empêche de prévenir la transformation de petites difficultés sur le plan du développement en problématique beaucoup plus importante pour la santé, le développement, mais aussi le bien-être futur de l’enfant », dénonce Fannie Dagenais.

À ce sujet, la directrice de l’observatoire lance un appel à agir de manière proactive en se basant d’abord sur les besoins des enfants plutôt que d’attendre d’obtenir un diagnostic qui arrive souvent trop tard ou qui peut s’avérer imprécis. Mme Dagenais rappelle que deux enfants qui reçoivent le même diagnostic n’ont pas nécessairement les mêmes besoins. Il faut savoir être agile pour leur offrir un soutien personnalisé.

Puis, au-delà des ressources d’aide en santé, on prive aussi des enfants de ressources d’aide éducatives, car encore une fois, il faut un diagnostic pour bénéficier de professionnels en milieu de garde. Ces ressources professionnelles sont souvent associées à un financement spécifique, réservé aux enfants ayant été dépistés par un professionnel de la santé.

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Des parents à cran

En plus de s’intéresser aux tout-petits, l’observatoire porte son regard sur les parents. Il rapporte que la pression subie par ceux-ci peut avoir des conséquences néfastes sur leur santé mentale et leur situation financière.

Certains se trouvent forcés d’abandonner leur emploi ou de réduire leurs tâches au travail afin de répondre aux besoins particuliers de leur enfant. D’autres se voient forcés d’investir des sommes d’argent importantes dans des services de santé privés afin d’obtenir un diagnostic et un suivi plus rapides pour leur enfant.

Des programmes existent tout de même pour venir en aide à ces parents devant apprivoiser à la fois la parentalité et le fardeau supplémentaire des besoins particuliers de leur enfant.

C’est le cas d’UnisSon, développé au CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal. Cette équipe composée d’éducateurs spécialisés, de psychoéducateurs, de physiothérapeutes, d’orthophonistes et d’autres spécialistes a pour objectif d’accompagner les familles dont un enfant montre des signes d’un possible trouble du spectre de l’autisme ou d’un retard de développement. L’équipe vient offrir des outils aux parents pour qu’eux soient en mesure de mieux soutenir leur enfant dans son développement jusqu’à son entrée à l’école.

« On a vraiment une approche qui est en lien avec les besoins de l’enfant », précise Nancy Deschambault, éducatrice spécialisée et spécialiste en activités cliniques du programme UnisSon. L’intervention se fait dès le premier signalement d’une hypothèse, et non pas à l’obtention d’un diagnostic pouvant prendre des mois, voire des années. Les délais actuels du programme sont de seulement 90 jours.

Lancé en 2017, UnisSon est un précurseur du programme Agir tôt déployé par le gouvernement à travers le Québec. Cette plateforme vise à accélérer le dépistage des enfants chez qui on soupçonne un retard de développement.



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