Québec ne veut plus de glyphosate dans ses étalages

Le glyphosate est la principale substance active du Roundup, un controversé herbicide mis en marché en 1975 par Monsanto.
Robyn Beck Agence France-Presse Le glyphosate est la principale substance active du Roundup, un controversé herbicide mis en marché en 1975 par Monsanto.

Le glyphosate disparaîtra des étalages de la Ville de Québec dès 2024. Si le conseil municipal entérine un règlement proposé par l’administration de Bruno Marchand, la capitale deviendra la troisième ville de la province à interdire la vente de cet herbicide popularisé par la firme Monsanto au milieu des années 1970.

Au début 2023, la Ville envisageait de réguler, à l’aide de permis, l’achat des pesticides d’usage domestique. Plusieurs consultations publiques menées au cours de l’hiver ont amené Québec à serrer davantage la vis en interdisant, purement et simplement, leur vente.

« La première mouture du règlement allait aussi loin que nous pensions pouvoir aller, précise Marie-Josée Asselin, responsable du développement durable et de l’environnement au conseil municipal. Ça obligeait les citoyens à se tourner vers des experts capables de leur proposer d’autres alternatives. En même temps, ça faisait porter une grande part de responsabilité sur les épaules des commerçants. Ça imposait à de jeunes commis de quincaillerie de demander à quelqu’un de présenter son permis. Nous avons préféré écouter la population et interdire tout simplement la vente. »

En vertu de ce nouveau règlement, la Ville de Québec entend aussi restreindre l’utilisation des pesticides. Désormais, la Ville autorisera seulement l’usage de biopesticides reconnus par Santé Canada sur son territoire. « L’application de tout autre pesticide sera interdite », souligne la mairie dans un communiqué — ce qui exclut d’emblée l’utilisation des néonicotinoïdes, mis au banc des accusés pour le déclin important des abeilles.

« Nous misons sur une liste blanche, explique Marie-Josée Asselin. Tous les produits qui ne figurent pas sur la liste se trouvent interdits d’office à Québec. »

Un herbicide sur la sellette

 

Le glyphosate est la principale substance active du Roundup, un herbicide mis en marché en 1975 par Monsanto, une entreprise américaine acquise en 2018 par le géant allemand Bayer.

Plusieurs inquiétudes concernant sa dangerosité pour la santé humaine et animale ont fait surface au cours des dernières années.

 

Depuis 2015, le Centre international de recherche sur le cancer de l’Organisation mondiale de la santé considère le glyphosate comme un « cancérigène probable ». Santé Canada ne partage toutefois pas cette opinion et mentionne, dans une décision datée de 2017, que la substance demeure sans danger pour la santé humaine et qu’« il est peu probable qu’[elle] présente un risque de cancer ».

Les justices française et américaine ont néanmoins condamné Bayer à débourser des sommes parfois extraordinaires en dommages et intérêts dans le cadre de procès intentés par des agriculteurs qui accusent le glyphosate d’être à la source de leur cancer.

D’autres études indiquent que le glyphosate contribue aussi au déclin des abeilles. La substance détruit également les plantes dont dépendent les papillons monarques, une espèce nord-américaine qui a vu sa population s’effondrer en seulement un quart de siècle.

L’exemple de Montréal

La Ville entend adopter son règlement à l’automne pour le voir entrer en vigueur dès 2024. Si le conseil municipal l’entérine, Québec emboîtera le pas à Granby et à Montréal, les deux premières villes à avoir interdit le glyphosate sur leur territoire.

La Ville a conscience que sa population pourra encore se procurer du glyphosate en ligne ou dans les municipalités voisines. Le règlement prévoit non seulement d’interdire sa vente, mais aussi son utilisation. Tout contrevenant s’exposera à des amendes cumulatives variant de 500 $ à 4000 $, expose Marie-Josée Asselin.

« Il y aura plusieurs inspecteurs capables de remettre des constats d’infraction. Ce ne sera pas seulement une escouade spéciale, ajoute-t-elle. Il y aura beaucoup de regards sur les commerçants. »

Quant aux risques de poursuites judiciaires, Québec se montre confiante. « La direction des affaires juridiques de la Ville nous a accompagnés dans l’écriture de ce règlement-là, fait valoir Marie-Josée Asselin. Il fallait voir à quels enjeux légaux s’exposait la Ville. Montréal a récemment été poursuivie par une compagnie d’entretien et elle a gagné sa cause. C’est sûr que quand nous avons des jugements comme ça, ça fait jurisprudence et ça nous donne un levier supplémentaire pour aller de l’avant. »

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