Un enfant à la mer!

Une école laissée à elle-même sans soutien communautaire et sans la participation et l’appropriation des parents eux-mêmes ne pourra jamais assurer la réussite des jeunes, estime l’auteur.
iStock Une école laissée à elle-même sans soutien communautaire et sans la participation et l’appropriation des parents eux-mêmes ne pourra jamais assurer la réussite des jeunes, estime l’auteur.

C’est l’image surprenante qui me trotte dans la tête en cette veille de rentrée scolaire partout au Québec. Je perçois, à tort ou à raison, une similitude avec tous ces migrants de par le monde, perdus en mer agitée, dans la recherche désespérée d’un nouveau port d’attache. N’est-ce pas un droit fondamental valide pour tous les humains de la Terre !

Le parallèle est un peu gros je l’admets, mais le point est clair, la souffrance humaine reste la même dans différentes situations difficiles et il n’y a pas de petites ou de grandes souffrances, il n’y a que de la souffrance tout court. Dans tout moment difficile, le port d’attache prend tout son sens.

L’école est un port d’attache important, un moment de transition majeur dans la vie d’un enfant. Pour la première fois, pour plusieurs, c’est un nouveau départ dans un autre monde plein d’inconnus, mais aussi l’occasion de grandes découvertes. Apprendre, socialiser et rêver, voilà ce que l’on doit attendre de l’école. Or l’école est actuellement en crise et rien ne laisse présager d’une éventuelle guérison à court ou moyen terme.

Le pauvre enfant qui entend toutes les nouvelles négatives concernant sa future école ne peut qu’être inquiet et déçu, perdu même. L’image d’une école délabrée et parfois toxique, celle d’un manque d’enseignants qualifiés, celle de la possibilité d’y subir des violences et de l’intimidation s’ajoutent au manque flagrant de spécialistes pour soutenir les jeunes sur le plan scolaire, social et mental. Les ressources manquent dans tous les secteurs et des droits fondamentaux sont bafoués avec des conséquences graves pour l’avenir des élèves.

Je me vois dans la peau d’un jeune enfant rempli d’espoir, porteur de plein de projets et en pleine confiance pour son avenir, mais qui s’aperçoit que son école, celle qu’il a vue de loin ou qu’il a pu explorer, n’est pas prête pour l’accueillir en grand, comme il se doit. Le port d’attache est en panne et pas à la hauteur pour l’accompagner dans le respect de ses droits. La déception sera grande, la motivation en prendra un coup et ceux parmi les plus vulnérables pourront continuer de voguer en rond, sans attaches et sans espoir.

Est-ce vraiment ce qu’on souhaite pour nos enfants ? Comment nous sentons-nous face à cette catastrophe anticipée, que faire pour changer cet état de fait scandaleux ? Je pense encore et toujours que la solution n’est pas que gouvernementale. On le voit dans le piétinement et le surplace des systèmes depuis des années. Cette situation persiste dans le temps et elle a même tendance à se cristalliser et à imploser.

Il y a plein de personnes qui vivent cette situation difficilement, des enseignantes dévouées, des spécialistes qui mettent les bouchées doubles, des programmes créatifs issus du milieu communautaire pour compenser les lacunes du système, mais cela risque de ne pas être suffisant. Il nous faut des écoles ouvertes sur leur milieu, il nous faut des communautés avec du pouvoir sur leurs écoles et il nous faut un gouvernement centré sur les besoins fondamentaux des enfants et sur le respect de leurs droits.

 

Une école laissée à elle-même, sans soutien communautaire et sans la participation et l’appropriation des parents eux-mêmes, ne pourra jamais assurer la réussite des jeunes.

Un enfant à la mer a besoin de notre engagement. Qu’attendons-nous pour le ramener à bon port ? Nous avons besoin d’un Québec fort dans tous les domaines et particulièrement en éducation et en santé, c’est une question de respect et de survie.

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