La Ville de Québec veut en finir avec la démolition de son patrimoine en catimini

La Ville de Québec resserre les critères auxquels les demandes de démolition de bâtiments patrimoniaux devront répondre avant d’obtenir un feu vert.
Photo: Renaud Philippe Archives Le Devoir La Ville de Québec resserre les critères auxquels les demandes de démolition de bâtiments patrimoniaux devront répondre avant d’obtenir un feu vert.

La Ville de Québec promet que la démolition de bâtiments patrimoniaux en catimini est chose du passé. En vertu d’un nouveau règlement, quiconque voudra démolir un immeuble cité devra dorénavant diffuser publiquement ses intentions, et la population obtiendra le pouvoir de contester sa demande.

Ne démolira plus qui veut dans la capitale nationale : la démolition sera confinée aux cas de dernier recours, et les embûches entre le pic des démolisseurs et les façades patrimoniales de la capitale seront multipliées.

Grosso modo, a résumé lundi Mélissa Coulombe-Leduc, la conseillère responsable du patrimoine à la Ville de Québec, « il sera interdit de démolir un bâtiment patrimonial à moins que les requérants puissent démontrer la nécessité ou les avantages de la démolition ».

La Ville resserre notamment les critères auxquels les demandes de démolition devront répondre avant d’obtenir un feu vert. Quiconque veut raser un édifice cité devra désormais soumettre aux instances concernées la présentation du projet qui le remplacera. L’approbation de ce dernier deviendra obligatoire pour obtenir la permission de démolir. La demande devra aussi s’accompagner d’une expertise professionnelle sur l’état de l’immeuble ; avant d’autoriser une démolition, la Ville privilégiera la restauration partout où elle sera possible.

Chaque demande de démolition devra également se faire connaître à deux endroits, soit sur le portail Web de la Ville et sur un panonceau accroché à l’immeuble visé. À la suite de ces publications, la population disposera d’une période de 10 jours pour s’opposer à la requête.

La Commission d’urbanisme et de conservation de Québec (CUCQ), en place depuis près d’un siècle, conserve la responsabilité d’étudier les demandes au cas par cas. Le nouveau règlement lui imposera cependant plus de transparence : elle devra, par exemple, organiser des séances d’informations publiques pour expliquer et justifier ses décisions.

Dans les demandes de démolition qui concernent des bâtiments classés patrimoniaux, la CUCQ devra aussi organiser des audiences publiques afin d’entendre la population. Si la commission accorde son feu vert à une démolition, toute personne aura 30 jours pour demander au conseil municipal de réviser la décision.

Pour la conseillère Coulombe-Leduc, ce nouveau règlement évitera ainsi aux gens de se retrouver à leur insu devant les ruines d’un bâtiment patrimonial qui faisait partie de l’identité de leur quartier.

La Ville de Québec compte présentement quelque 20 000 bâtiments relevant de la CUCQ. Et cette liste devrait s’allonger dès novembre prochain, prévoit la Ville.

Ce nouveau règlement relatif à la démolition d’immeubles s’ajoute à l’arsenal déployé par la capitale pour conserver son patrimoine bâti. Un autre règlement, celui-ci sur l’occupation et l’entretien des bâtiments, oblige depuis décembre dernier les propriétaires à maintenir en bon état leur édifice pour éviter leur détérioration. L’idée, souligne la conseillère du district Cap-aux-Diamants, est de prévenir le dépérissement du patrimoine bâti avant que la démolition devienne inévitable.

Contrevenir aux dispositions de ces deux règlements est un pensez-y-bien pour le portefeuille : les sanctions maximales prévues se chiffrent à 250 000 $. Une personne morale qui démolit un bâtiment patrimonial sans autorisation préalable sera dorénavant passible d’une amende de plus d’un million de dollars.

Le règlement relatif à la démolition d’immeubles doit entrer en vigueur à compter d’avril 2023.

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