L’art comme bouée de sauvetage

Laetitia Arnaud-Sicari
Collaboration spéciale
« Les gens qui viennent au CAP cherchent une écoute empathique et un lieu d’expression de soi. Je vois vraiment des gens avec des lumières dans les yeux », observe Maude Robinson, art-thérapeute.
Photo: CAP « Les gens qui viennent au CAP cherchent une écoute empathique et un lieu d’expression de soi. Je vois vraiment des gens avec des lumières dans les yeux », observe Maude Robinson, art-thérapeute.

Ce texte fait partie du cahier spécial Santé mentale

Utiliser l’art dans le but de favoriser la réinsertion sociale et professionnelle des personnes vivant avec des difficultés psychologiques et émotionnelles ? C’est ce que fait depuis maintenant 40 ans le Centre d’apprentissage parallèle de Montréal (CAP), organisme communautaire régional en santé mentale.

« Ça a commencé par l’art-thérapie, la peinture, le tissage […] et aujourd’hui on a beaucoup diversifié. On fait du chant, de la danse, du théâtre et de la musique. Ce qu’on cherche, c’est à contribuer le plus possible au rétablissement de la personne », souligne Xavier Bonpunt, directeur général et artistique du CAP, fondé en 1983.

Programme de préparation à l’emploi et de prévention à l’épuisement professionnel, activités d’intégration socioprofessionnelle, programme d’art-thérapie pour accompagner les jeunes et les jeunes adultes, et programme d’expression artistique pour mieux aider à fonctionner au quotidien : les cinq services offerts par le CAP visent à répondre à différents besoins et à soutenir une clientèle variée sous la forme d’ateliers ou de séances. « La plupart du temps, on développe des compétences relationnelles et sociales. Le pire complice de la santé mentale, c’est l’isolement. C’est pour ça que nos activités sont en groupe, avec des suivis individuels au besoin », explique M. Bonpunt.

« L’art-thérapie au CAP, on mise vraiment sur le processus personnel, d’expression de soi et de création, et non sur le résultat. On respecte le rythme et les limites de chacun. […] On utilise vraiment l’art comme un langage », ajoute Maude Robinson, art-thérapeute oeuvrant depuis près de 10 ans au CAP.

Soutenir une mission d’inclusion

Chaque année, des personnalités issues du milieu culturel québécois donnent un coup de main au CAP en créant une centaine d’autoportraits pour Moi m’aime, un encan-bénéfice. L’année 2023 marquait d’ailleurs la 10e édition de cette vente aux enchères, qui s’est déroulée du 26 avril au 3 mai : 100 000 $ ont été amassés grâce aux oeuvres. « Ça fonctionne de mieux en mieux. Ça permet de développer l’organisme dans de bonnes conditions et de combler des manques de financement public, lequel augmente très peu », dit Xavier Bonpunt.

Le but de Moi m’aime est également de briser le tabou entourant la santé mentale. Puisque c’est environ un Canadien sur trois qui sera affecté par une maladie mentale au cours de sa vie, la préoccupation est majeure, fait-il remarquer. « Tous les organismes communautaires en santé mentale le savent depuis de nombreuses années. […] Et la pandémie a fait de gros dégâts. C’est de plus en plus important d’en parler, mais aussi de bien en parler », dit M. Bonpunt.

Une aide de plus

Pour le directeur général et artistique du CAP, le milieu communautaire peut offrir un service complémentaire en santé mentale à celui des « hôpitaux, des cliniques et des CLSC, qui sont surchargés » puisque les besoins sont criants. « C’est une alternative très intéressante. L’intérêt du communautaire, c’est de délester, parce qu’on peut résoudre quelquefois des problèmes assez majeurs », estime-t-il.

« Les gens qui viennent au CAP cherchent une écoute empathique et un lieu d’expression de soi. Je vois vraiment des gens avec des lumières dans les yeux » à la fin des ateliers, raconte Maude Robinson.

Même si l’art-thérapie et l’utilisation de moyens artistiques ne sont pas des solutions miracles, Mme Robinson soutient qu’il y a bel et bien de « petites victoires ». « Il y a des personnes qui arrivent en dépression, qui ont des idées suicidaires. Il y en a qui restent [au CAP] pendant plusieurs années. On voit vraiment une différence lorsqu’on regarde [ce que c’était] quand la personne est arrivée. C’est du soutien au quotidien qu’on leur offre », indique l’art-thérapeute.

Dans le but de lancer officiellement leur projet « CAP sur la relève », né durant la pandémie pour prévenir le décrochage scolaire chez les jeunes, le CAP organisera des activités sur l’art-thérapie du 18 au 19 octobre au Complexe Desjardins.

Le plein air contre la psychose

Connaissez-vous la thérapie par l’aventure ? De plus en plus populaire dans la province, cette approche a pour objectif d’améliorer la santé mentale à travers des activités en plein air. C’est d’ailleurs ce que Camille Girard, qui est aujourd’hui psychologue en santé mentale au CISSS de Lanaudière, a expérimenté dans le cadre de sa thèse de doctorat. Avec une quinzaine de personnes âgées de 19 à 30 ans souffrant de problèmes psychotiques, elle s’est rendue en plein coeur de la Vallée du Bras-du-Nord pendant quatre jours. « Cette aventure a amené de l’adrénaline et une prise de risques qui a éveillé un côté plus vivant de leur personnalité, a-t-elle révélé en entrevue avec Actualités UQAM. L’expédition leur a prouvé qu’ils étaient capables de réaliser des objectifs et d’entrer en relation avec les autres. »

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.



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