Catherine Ringer et le vice de la joie au FIL

Grégoire Hetzel, Mauro Gioia, Catherine Ringer et Alice Mendelson, l'équipe de création du spectacle L’érotisme de vivre, présenté dans le cadre du FIL.
Mathias Walter Grégoire Hetzel, Mauro Gioia, Catherine Ringer et Alice Mendelson, l'équipe de création du spectacle L’érotisme de vivre, présenté dans le cadre du FIL.

Elle sera là avec ses gestes de gitane et sa voix forte et grave de femme mûre. Catherine Ringer est une bombe d’énergie, d’émotion, de talent et de créativité. C’est avec tout ça qu’elle revient monter sur les planches du Festival international de la littérature (FIL) cette année. Elle vient nous présenter des poèmes d’Alice Mendelson, une amie de son père, dont elle a découvert la poésie sensuelle. Le spectacle s’appelle L’érotisme de vivre.

« Ce sont des poèmes qui parlent d’amour physique et de passion, et qui sont très sensuels. Et puis après, ça passe à autre chose aussi. Mais il y a toujours cette passion de la vie, cette passion de la couleur, de la lumière et des êtres, donc c’est quelque chose de plus large qu’uniquement des poèmes sur la sexualité », raconte-t-elle en entrevue. Alice Mendelson a aujourd’hui 97 ans.

La chanteuse du défunt groupe Les Rita Mitsouko et la conjointe et collègue de Fred Chichin (mort en 2007) assume elle-même fort bien sa soixantaine. Elle a même chanté « Senior, j’adore », une chanson qui la suit de l’oeuf à la maturité. Oui, sa voix est devenue plus grave de quelques tons. Oui, il faut s’entraîner pour maintenir la présence sur scène. « Mais je trouve qu’il y a des choses qu’on gagne d’un autre côté. La vie évolue. On ne voit pas les choses de la même manière. C’est assez passionnant, je trouve. Et je suis contente que la vie se termine aussi à un moment. Je ne voudrais pas vivre indéfiniment », dit-elle.

Les poèmes d’Alice Mendelson ont été écrits, quant à eux, entre 1947 et 2022. Et ils n’avaient jamais été publiés avant que Catherine Ringer décide d’en faire un spectacle, dans le but d’amasser de l’argent pour un théâtre.

Des poèmes découverts

 

Catherine Ringer a connu Alice Mendelson après la mort de son père. Après avoir été professeure de français durant des années, Mme Mendelson était devenue conteuse, lorsqu’un ami parle à Catherine Ringer de la qualité de ses poèmes. Après les avoir lus, Catherine Ringer décide de les mettre en spectacle, sur la musique de Grégoire Hetzel. « Je les ai trouvés magnifiques et ils m’ont inspirée », dit-elle. Le résultat est tout de suite positif.

« Ça a eu vraiment du succès, se souvient-elle. Les gens sortaient avec les yeux brillants et étaient comme nourris. »

Ils sont nourris, sans doute, par la résilience de cette femme, qui parle de la nécessité d’entretenir « le vice de la joie », qui suggère de « ne jamais bâcler de vivre ». « C’est un exemple pour continuer à vivre vieux, dit Catherine Ringer. C’est une de ces personnes remarquables qui font du bien aux autres. » Porté par le succès du premier, un autre spectacle suit, et c’est alors qu’une maison d’édition propose à Alice Mendelson de publier ses textes sous le titre : L’érotisme de vivre. « Elle était très contente », dit la chanteuse.

C’est un exemple pour continuer à vivre vieux. C’est une de ces personnes remarquables qui font du bien aux autres.

C’est ce spectacle qu’elle apporte donc chez nous, dans ce Québec qu’elle a beaucoup fréquenté avec son conjoint et collègue Fred Chichin, qui souhaitait d’ailleurs s’y établir avant de mourir emporté par un cancer.

« Il avait envie de changer de pays. Et il aimait beaucoup votre pays pour la facilité d’entreprendre », raconte-t-elle.

Aujourd’hui, Alice Mendelson est alitée. « Elle n’est pas mourante, mais elle est sur la fin », dit Catherine Ringer. Comme son père, Sam Ringer, qui a vécu les camps de concentration, Alice Mendelson est d’origine juive polonaise et a traversé la Seconde Guerre mondiale. « Elle, c’est son père qui a été déporté. Il a été raflé par la police française à l’époque, et elle et sa mère ont été justement sauvées aussi par un agent de police. Il leur a dit de se cacher et elles se sont enfuies dans les charrettes de foin. Et puis elle est devenue résistante. »

Résistante, elle l’est encore aujourd’hui. « Quand je vais la voir, il y a des moments d’éveil magnifiques », dit Catherine Ringer. S’éveiller, surtout, vivre, avant de mourir.

L’érotisme de vivre

Poèmes de Alice Mendelson, l

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