Les tensions diplomatiques entre le Canada et l’Inde pourraient durer des mois

Le premier ministre Justin Trudeau a annoncé lundi que les services de renseignement canadiens enquêtent sur « un lien potentiel » entre le gouvernement indien et la mort du leader sikh Hardeep Singh Nijjar.
Sean Kilpatrick La Presse canadienne Le premier ministre Justin Trudeau a annoncé lundi que les services de renseignement canadiens enquêtent sur « un lien potentiel » entre le gouvernement indien et la mort du leader sikh Hardeep Singh Nijjar.

Un expert pense que le Canada n’est peut-être qu’au début d’une querelle diplomatique de plusieurs mois avec l’Inde, alors que les alliés attendent plus d’informations sur les accusations selon lesquelles New Delhi a joué un rôle dans la mort d’un citoyen canadien.

Roland Paris, qui dirige l’école supérieure d’affaires internationales de l’université d’Ottawa, estime que les deux pays ont fait des déclarations contradictoires, ce qui rend difficile la recherche d’un terrain d’entente.

Lundi, le premier ministre Justin Trudeau a annoncé que les services de renseignement canadiens enquêtaient sur « un lien potentiel » entre le gouvernement indien et la mort du leader sikh Hardeep Singh Nijjar en Colombie-Britannique.

L’Inde qualifie ces allégations d’« absurdes et motivées », ce qui a conduit M. Trudeau à exhorter l’Inde à prendre ces allégations au sérieux et à coopérer à l’enquête policière.

Le Canada a expulsé un diplomate indien de haut rang lundi.

 

L’Inde a ensuite expulsé un envoyé canadien, arguant que le Canada abritait des extrémistes qui voulaient un pays séparé pour les Sikhs.

Selon M. Paris, le refroidissement diplomatique ne fait que commencer et il est difficile de savoir si ces tensions vont s’améliorer ou s’aggraver au fur et à mesure que l’enquête se poursuit.

« Nous n’en sommes qu’au début de cette période de tension diplomatique entre les deux pays », a-t-il déclaré lors d’une entrevue.

« Ce sera difficile, maintenant que le gouvernement indien s’est publiquement retranché dans ses positions et a opposé un démenti catégorique à ces allégations. »

M. Paris, ancien conseiller en politique étrangère de M. Trudeau, a fait remarquer que, selon certaines informations, le gouvernement aurait rendu publique cette accusation à la suite de questions posées par les médias et de rumeurs dans les communautés de la diaspora.

Une question d’ingérence étrangère

Selon M. Paris, toute cette affaire souligne l’importance de s’attaquer à l’ingérence étrangère dans son ensemble.

« Il est important que le Canada travaille en étroite collaboration avec ses alliés pour résister à ce type de pressions », a affirmé M. Paris.

« Mais avant tout, nous devons être en mesure de leur résister chez nous. Le monde dans lequel nous vivons est beaucoup plus dangereux et nous ne pouvons pas compter autant que par le passé sur nos alliés. Nous devons vraiment nous assurer que nous protégeons les Canadiens dans ce contexte. ».

Le chef du Parti conservateur, Pierre Poilievre, a demandé à M. Trudeau de partager davantage d’informations sur les renseignements dont dispose Ottawa, et l’ancien ministre libéral des Affaires étrangères, Marc Garneau, a lui aussi déclaré que le gouvernement devrait étayer cette affirmation avec plus de détails.

M. Paris a déclaré qu’il n’était pas certain que l’Inde prenne des mesures de rétorsion contre le Canada, par exemple en bloquant les échanges commerciaux ou en retardant les visas, et qu’il était possible qu’Ottawa prenne des mesures similaires à l’encontre de l’Inde.

Il a toutefois fait remarquer que l’Inde et le Canada se considèrent généralement comme des amis, malgré des tensions de longue date concernant les séparatistes sikhs.

« Je ne m’attends pas à ce que les choses bougent beaucoup, à moins que d’autres informations ne soient révélées », a indiqué M. Paris.

« Il semble qu’ils aient vraiment essayé de travailler en coulisses et d’utiliser la diplomatie pour obtenir des résultats directement avec les Indiens et avec l’aide de leurs proches alliés canadiens. Il est clair que cela n’a pas fonctionné en fin de compte. »

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