L’intestin de certains patients atteints de la COVID longue semble plus perméable

Plus les symptômes de la forme longue de la COVID-19 sont sévères, plus la dysfonction de la barrière intestinale est importante, selon les chercheurs.
Graham Hughes Archives La Presse canadienne Plus les symptômes de la forme longue de la COVID-19 sont sévères, plus la dysfonction de la barrière intestinale est importante, selon les chercheurs.

Les individus atteints de la forme longue de la COVID-19 et qui présentent des symptômes neurologiques ont une flore intestinale différente, a-t-on entendu mercredi dans le cadre du premier Symposium canadien sur la COVID longue, qui se déroule à l’hôtel Hilton Midtown, à Montréal.

Ce microbiote peut entraîner l’apparition de symptômes neurologiques quand il est transféré à des souris qui avaient été modifiées génétiquement pour ne pas avoir de flore intestinale et qui n’avaient jamais été infectées par le virus de la COVID-19, a précisé la Dre Emilia Liana Falcone, de l’Institut de recherches cliniques de Montréal (IRCM).

Beaucoup de littérature scientifique s’est intéressée au rôle du microbiote intestinal dans différents problèmes de santé, a-t-elle rappelé dans le cadre de sa présentation.

« On sait que, par le biais de son interaction avec le système immunitaire, ça peut avoir un impact sur des troubles neurologiques, la maladie cardiaque, la maladie pulmonaire, les troubles métaboliques, a dit la Dre Falcone. Donc, pourquoi est-ce que ça ne serait pas aussi impliqué dans le contexte de la COVID longue ? »

La Dre Falcone dirige la clinique de recherche IRCM post-COVID-19 (IPCO). Ses collègues et elle ont constaté que le microbiote intestinal de leurs patients atteints de la COVID de longue durée et qui présentent des symptômes neurologiques est moins diversifié, « et la diversité est associée à une meilleure santé », a-t-elle rappelé.

En revanche, le microbiote intestinal des patients atteints de la forme longue de la COVID-19, mais qui n’ont pas symptômes neurologiques, est comparable à celui des patients qui n’ont jamais eu la COVID.

Un microbiote distinct

 

« La signature du microbiote intestinal des patients qui ont la COVID et des symptômes neurologiques est distincte, a dit la Dre Falcone. Certains microbes sont plus représentés, mais certains le sont moins. »

Certains de ces microbes sous-représentés sont plus présents chez les patients qui n’ont pas développé de symptômes graves de la COVID, voire qui n’ont jamais été infectés par le virus, a-t-elle précisé.

Les chercheurs ont greffé à des souris dont l’intestin était stérile le microbiote de patients souffrant de la COVID de longue durée et présentant des symptômes neurologiques et celui de patients souffrant de la COVID longue sans symptômes neurologiques. Les souris du premier groupe ont été moins performantes que celles du deuxième lors de différents tests.

Les chercheurs ont aussi mesuré une association entre l’augmentation de la sévérité de la forme longue de la COVID-19 et une augmentation de la dysfonction de la barrière intestinale. Plus les symptômes de la COVID longue étaient sévères, plus on retrouvait dans le sang des patients une protéine qui témoigne d’une plus grande perméabilité de la barrière intestinale — en d’autres mots, d’un intestin qui fuit.

Ces fuites ― qui étaient encore détectables 12 mois après l’infection initiale ― pourraient ensuite venir perturber le fonctionnement du système immunitaire du patient et le prédisposer à une réponse auto-immunitaire.

« Nous ne pensons pas que cette dysbiose intestinale est la seule joueuse dans ce mécanisme, a dit la Dre Falcone. Nous pensons que la persistance virale joue aussi un rôle. C’est probablement la combinaison des deux qui contribue à l’inflammation soutenue. »

Cette inflammation, a-t-elle ajouté, pourrait ensuite contribuer à la dysrégulation du système immunitaire et aux problèmes de microcoagulation que d’autres études ont mis en cause pour expliquer la forme longue de la COVID-19.

« Je pense que tout ça est interrelié », a dit la Dre Falcone.

Quelque 4,7 millions de Canadiens ont été infectés par le SRAS-CoV-2 depuis le début de la pandémie. On estime qu’environ 15 % d’entre eux garderont des séquelles à long terme de leur infection.

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