Écosystèmes nordiques et aquatiques : fédérer les expertises pour mieux comprendre les changements

De mai à octobre, le Lampsilis navigue sur toute la portion d’eau douce du fleuve Saint-Laurent, afin de permettre à plusieurs chercheurs de collecter de précieux renseignements sur l’environnement fluvial et ses écosystèmes.
Photo: André Benoit Cotton De mai à octobre, le Lampsilis navigue sur toute la portion d’eau douce du fleuve Saint-Laurent, afin de permettre à plusieurs chercheurs de collecter de précieux renseignements sur l’environnement fluvial et ses écosystèmes.
Avec ses chercheurs venus de tous horizons, le Centre RIVE occupe une position clé pour mieux appréhender les effets qu’auront les changements climatiques sur une foule d’enjeux touchant les cours d’eau québécois et le Grand Nord.

Haut lieu de biodiversité, la zone littorale du lac Saint-Pierre abrite une grande variété de milieux humides où vit une foule d’espèces, autant floristiques que fauniques. Écosystèmes essentiels mais souvent mal aimés, les milieux humides — marais, marécages, tourbières, étangs — sont utilisés par les mammifères, les poissons et les oiseaux pour se reproduire, nidifier et s’alimenter. Ceux du lac Saint-Pierre représentent près de 63 % de l’ensemble des superficies humides du fleuve Saint-Laurent. Ces terres jouent également un rôle important pour nourrir le Québec, puisque c’est un milieu agricole particulièrement fertile, et les agriculteurs sont directement touchés par les changements climatiques.

Le Pôle d’expertise multidisciplinaire en gestion durable du littoral du lac Saint-Pierre, mis en place en 2018 par un effort concerté de plusieurs ministères — dont celui de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs et celui de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation —, a ainsi comme mandat « de proposer une stratégie d’intervention dans la zone littorale favorisant la mise en place d’une agriculture durable, adaptée et respectueuse de l’écosystème du lac Saint‐Pierre et soutenant la restauration de milieux prioritaires ». Pour cela, il fait intervenir des chercheurs de trois universités (UQTR, McGill et Laval) et de différents domaines.
Julie Ruiz, professeure en géographie humaine et aménagement du territoire. Raphaël Proulx, professeur au Département des sciences de l’environnement de l’UQTR.

« C’est un projet majeur pour nous, parce qu’on voit que les membres ont réussi à se fédérer pour piloter un programme de recherche cohérent de grande envergure, constate Julie Ruiz, professeure en géographie humaine et aménagement du territoire. Ça permet d’étudier les impacts des changements globaux de manière non pas sectorielle, mais intégrée, pour comprendre les impacts à plus grande échelle et cumulatifs. »

« De la goutte d’eau au fleuve »

Ce pôle représente une occasion de synergie pour les membres du Centre de recherche sur les interactions bassins versants – écosystèmes aquatiques (RIVE) de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) qui, depuis douze ans, forme des collaborations multidisciplinaires pour explorer le fonctionnement des écosystèmes nordiques d’un côté et des bassins versants du fleuve Saint-Laurent de l’autre, afin de comprendre les milieux aquatiques, « de la goutte d’eau au fleuve ».

« On s’intéresse de façon plus générale aux changements globaux, qui incluent toutes les adaptations aux changements climatiques, par exemple les impacts sur la qualité de l’eau et du sol, la biodiversité, et la réponse des populations humaines aux pressions environnementales, résume Raphaël Proulx, professeur au Département des sciences de l’environnement de l’UQTR. La résilience et l’adaptation aux changements globaux nécessitent de travailler à différentes échelles en amont et en aval de ces enjeux. C’est ce qu’on tente de faire collectivement. »

Le centre mène par ailleurs des travaux de recherche à la fois fondamentaux et appliqués, afin de « bénéficier de connaissances fondamentales qui vont servir sur le terrain à la gestion et à la réhabilitation des écosystèmes », ajoute Julie Ruiz.
Photo: Esther Lévesque Dans le Nord, les chercheurs observent une augmentation importante des arbustes décidus (qui perdent leurs feuilles pendant une partie de l’année).

La force de la multidisciplinarité

Raphaël Proulx et Julie Ruiz codirigent le Centre RIVE depuis cinq ans. Cette codirection pluridisciplinaire « nous permet de rallier une plus grande diversité de chercheurs », avance Mme Ruiz. Le centre entretient aussi des liens solides avec d’autres groupes de chercheurs et d’autres infrastructures de recherche. « On est bien placés pour accentuer les synergies et les intégrer dans des dynamiques déjà en place », ajoute-t-elle. Parce que c’est la diversité des expertises et des collaborations qui permettront de mieux comprendre ces enjeux complexes.

Parmi eux, les écosystèmes nordiques qui subissent de plein fouet le dérèglement du climat.

« On le sait, le Nord se réchauffe rapidement », note M. Proulx. Effets sur les communautés et les Premières Nations, dynamique du pergélisol, interaction entre la neige, la glace et la végétation : « On s’intéresse à tous les impacts », indique-t-il, réaffirmant par le fait même une tradition de recherche en milieu nordique, forte à l’UQTR. Ainsi, des spécialistes de la neige, du sol et de la végétation travaillent main dans la main pour observer si le Nord verdira rapidement par exemple. Autre particularité de ces travaux, l’implication dans les recherches des populations, notamment les communautés autochtones, directement concernées par ces thématiques, une collaboration qui résulte d’un travail de fond pour tisser des liens de confiance.

« On ne peut pas faire de recherche-action sans travailler avec le milieu », rappelle M. Proulx. Des camps de sciences en milieux nordiques sont notamment organisés pour partager les connaissances avec les jeunes des communautés. Les chercheurs du Centre RIVE travaillent d’ailleurs toujours en partenariat avec tous les acteurs des milieux étudiés — MRC, villes, organisations de conservation et de bassin versant, ministères, producteurs agricoles, etc.
Photo: Esther Lévesque À une centaine de mètres du front d’un glacier, sur l’île d’Ellesmere, la professeure en sciences de l’environnement de l’UQTR, Esther Lévesque, examine un couvert de mousse apparaissant parmi les blocs de roche relâchés par le glacier.

Des installations uniques

Le Centre RIVE compte aujourd’hui 15 chercheurs permanents, de même qu’une centaine de membres actifs, dont de nombreux étudiants de 2e et de 3e cycle. Écologie, géographie humaine et physique, biologie : les expertises variées au sein d’une même unité de recherche permettent d’aborder les questions brûlantes d’actualité sous plusieurs angles. Les chercheurs disposent par ailleurs d’installations uniques à la pointe de la technologie.

Le Lampsilis, d’abord, est un bateau-laboratoire équipé d’instruments d’échantillonnage qui concentre ses analyses sur la portion d’eau douce du fleuve Saint-Laurent et de son estuaire. Un laboratoire humide permet d’étudier, à même le campus, l’écologie des poissons, grâce notamment à ses 16 bassins et à une rivière artificielle de 15 mètres de longueur. Finalement, les chercheurs peuvent analyser la qualité des sols et de l’eau grâce aux infrastructures du Laboratoire d’analyse en écologie aquatique et en sédimentologie à l’UQTR.

Diversité des expertises, qualité des infrastructures, animation scientifique, formation de la relève dans deux environnements importants pour le Québec et le Canada sont donc les ingrédients clés du Centre RIVE. Plutôt qu’un collage de chercheurs de différentes disciplines, c’est la collaboration entre eux qui fait sa grande force, et qui mènera à mieux comprendre les changements qui nous attendent. « Le groupe permet d’aller beaucoup plus loin que l’individu dans les enjeux environnementaux actuels », conclut Mme Ruiz.

Pour une relève assurée

Une des forces du Centre RIVE est sa capacité à former la relève. « Les membres ont la capacité de travailler ensemble et de former des étudiants qui sont aux prises avec différents champs de recherche », souligne Julie Ruiz. Des dizaines d’étudiants du 1er, 2e et du 3e cycle et des postdoctorants sont ainsi membres du Centre RIVE et participent aux recherches. Ceux-ci ont la chance d’être exposés à une variété de techniques, de champs de recherche et de perspectives. « Ça permet de former des personnes qui demain seront à même de travailler sur les différentes dimensions des changements climatiques », croit la codirectrice.

De multiples activités de sensibilisation et d’animation scientifiques sont également portées par les membres du RIVE. Le NumériLab, une activité de formation sur le numérique donnée par et pour les étudiants, obtient un grand succès, année après année. Symposium annuel, série de conférences, défi du RIVE-Hacking (un événement de 48 heures pour travailler sur les données ouvertes en équipe de chercheurs étudiants) servent à mettre en commun les expertises et à enrichir les apprentissages des étudiants.


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