Toujours sans nouvelles d’Ottawa sur le décompte d’arbres plantés en 2022

Un homme plante des arbres dans la forêt Montmorency, au nord de Québec.
Francis Vachon Le Devoir Un homme plante des arbres dans la forêt Montmorency, au nord de Québec.

Le gouvernement fédéral n’a toujours pas publié son décompte des arbres plantés l’été dernier en lien avec son projet d’en faire pousser deux milliards en une décennie, alors qu’un rapport du commissaire à l’environnement laisse croire à un ratage complet de la cible.

Tout un hiver et un printemps n’auront pas suffi au gouvernement fédéral pour compiler les informations de ses partenaires qui ont planté ces arbres en 2022. Le ministère responsable avait pourtant promis de publier ce nombre au printemps.

« Pour ce qui est du nombre précis d’arbres plantés, les estimations finales des nombres d’arbres mis en terre l’année précédente sont normalement prêtes à la fin du printemps », écrivait en mai Jay Medland, porte-parole de Ressources naturelles Canada.

Même le commissaire à l’environnement du Canada, l’agent du Parlement chargé de surveiller les actions du gouvernement, précisait dans son rapport s’attendre à ce que « le nombre définitif d’arbres plantés à l’été 2022 [soit] disponible après mai 2023 ».

Loin de la cible

Le commissaire à l’environnement du Canada, Jerry V. DeMarco, ne s’est pas limité à cet échéancier et a entrepris en avril de calculer lui-même les arbres qui devaient être plantés en 2022. Il est arrivé à la conclusion que le fédéral a probablement raté de beaucoup sa cible de 60 millions d’arbres pour l’an dernier. Si tous les accords signés ont été honorés, moins du tiers de ces arbres, soit 16,5 millions, ont été plantés. C’est beaucoup moins que les 29 millions de l’année précédente, alors que le programme doit au contraire augmenter prodigieusement sa cadence.

Ce décompte non officiel avait été accueilli avec déni par le ministre de l’Environnement et du Changement climatique, Steven Guilbeault.

« [Pour] 2022, on n’a pas encore tous les résultats, mais ça va tourner autour de 60 millions [d’arbres]. Nous devons assez rapidement arriver à une vitesse de croisière où nous pourrons collaborer à planter 300 millions d’arbres par année. Nous demeurons engagés à atteindre cet objectif-là », avait-il alors répondu aux journalistes.

Pour la saison de 2021, le calcul du nombre d’arbres plantés avait été rendu public le 22 juin de l’année suivante. Le bureau du ministre responsable, Jonathan Wilkinson, aux Ressources naturelles, n’a pas souhaité dire au Devoir si le rapport attendu cette année doit confirmer, ou non, le ratage spectaculaire de son objectif pour 2022.

Il a toutefois rappelé que son ministère avait déjà évoqué « l’été 2023 » comme échéancier pour la publication du rapport de la saison de plantation dernière, ce qui lui fait dire qu’il n’y a pas encore de retard.

« Le programme a l’intention cette année de fournir aux Canadiens, à l’été 2023, un rapport complet sur les progrès réalisés durant la saison de plantation 2022, une fois que les partenaires auront communiqué le nombre définitif d’arbres plantés au cours de la deuxième année du programme », peut-on lire dans un document d’information publié en avril.

Conflit avec les provinces en vue

Selon le commissaire DeMarco, l’insuccès de la saison de plantation 2022 est notamment dû au fait que l’appel de propositions de décembre 2021 n’était pas ouvert aux provinces. Ottawa exige d’elles la signature « d’ententes de principe » pour avoir accès au financement. À ce jour, sept provinces et territoires ont signé l’entente de principe, mais pas le Québec ni l’Ontario.

M. DeMarco entrevoit d’ailleurs un avenir miné de problèmes de collaboration entre le fédéral et les provinces à ce sujet, puisque ces dernières seraient responsables de planter les deux tiers des arbres, selon le plan. « L’absence d’accords [à long terme avec les provinces] constitu[e] un risque considérable pour le programme », écrit-il.

Le programme de deux milliards d’arbres doit coûter 3,2 milliards de dollars au gouvernement fédéral sur 10 ans, à partir de 2021. Il vise à financer les projets des provinces et territoires avant tout, mais aussi des municipalités, d’organisations non gouvernementales, des communautés autochtones et même de propriétaires privés.

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