La course au calcul quantique est ouverte

Quantum System One alimenté par un processeur quantique utilitaire en cours d'installation à IBM Bromont pour PINQ²
Photo: IBM Quantum System One alimenté par un processeur quantique utilitaire en cours d'installation à IBM Bromont pour PINQ²

Le Québec accueille l’un des rares ordinateurs quantiques au monde, Quantum System One, en cours de déploiement aux installations de l’entreprise IBM à Bromont. La plateforme d’innovation numérique et quantique du Québec (PINQ²) deviendra le seul opérateur de cette technologie au Canada.

PINQ², un organisme sans but lucratif mis sur pied en 2021 par le ministère de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie du Québec, vise par cette collaboration avec IBM à encourager la transition de l’industrie vers l’informatique quantique, une technologie pleine de promesses.

À cette fin, l’entente négociée entre IBM et PINQ² fera de Bromont le premier pôle québécois de transition quantique centré sur les domaines du développement durable et de la finance. « PINQ² va être l’un des cinq opérateurs d’ordinateurs quantiques au monde, en dehors des États-Unis, qui s’est vu donner un mandat par IBM, explique Gael Humbert, directeur du développement d’affaires et de stratégie chez PINQ², en entrevue avec Le Devoir.

La principale force de l’ordinateur quantique d’IBM est l’optimisation, en raison des calculs très rapides qu’il peut effectuer grâce à ses 127 qubits, une unité quantique. Contrairement aux bits, qui sont composés de 0 et de 1, les qubits peuvent aussi revêtir n’importe quelle forme entre 0 et 1. Leur malléabilité permet d’entreprendre un grand volume de calcul en simultané.

L’idée est vraiment de voir quels sont les problèmes qui pourront être résolus avec ces ordinateurs

 

L’offre de calcul du Quantum System One permettra donc de résoudre des problèmes d’optimisation liés à la consommation d’énergie, aux défis d’adaptation aux changements climatiques et à l’évaluation des risques environnementaux. Dans le domaine de la finance, il pourra calculer rapidement selon la méthode de Monte Carlo, un ensemble d’algorithmes permettant d’évaluer les risques économiques et de favoriser la prise de décision.

Réunir l’industrie et la recherche

L’ordinateur d’IBM sera aussi mis au profit de la recherche à travers un partenariat avec les universités. « Notre objectif à la base est de développer le transfert de connaissances, surtout technologiques, du monde académique vers le monde industriel », explique le directeur de PINQ².

« L’Université de Sherbrooke est déjà notre partenaire et donne déjà accès à notre ordinateur via l’infonuagique, précise le directeur. Dans les prochains mois, on devrait annoncer des partenariats avec d’autres universités québécoises. »

Grâce à cette nouvelle acquisition, Québec souhaite ainsi se positionner comme pôle mondial de recherche sur les technologies quantiques.

Calcul Québec accueillera Monarq

La plateforme Calcul Québec, un organisme sans but lucratif permettant aux chercheurs de déposer des demandes de calculs complexes auprès de ses quatre superordinateurs, se dotera, elle aussi, d’un nouvel ordinateur quantique.

Dès janvier 2024, Calcul Québec inaugurera son propre ordinateur quantique, nommé Monarq, qui rejoindra les superordinateurs Narval et Béluga dans les locaux de l’École de technologie supérieure (ETS) à Montréal.

Selon la directrice générale de Calcul Québec, Suzanne Talon, les ordinateurs quantiques n’offrent « pas d’application commercialement avantageuse » en raison de leur caractère trop expérimental, mais cela ne diminue en rien l’importance stratégique de s’en munir pour les étudier.

« Les ordinateurs quantiques, pour l’instant, c’est encore des jouets, souligne la directrice. Aucun de ces ordinateurs ne va faire quelque chose d’utile pour l’instant, au sens où on peut faire les mêmes calculs sur un ordinateur classique et c’est tout aussi rapide. »

Par contre, on s’attend à ce que les prochaines générations d’ordinateurs quantiques puissent faire ces calculs de façon plus efficace que les ordinateurs classiques », prédit Mme Talon, qui anticipe l’apparition de nouvelles générations d’ordinateurs quantiques surpassant en puissance les superordinateurs classiques dans 5, 10 ou 20 ans.

D’ici là, « l’idée est vraiment de voir quels sont les problèmes qui pourront être résolus avec ces ordinateurs et de s’assurer que les entreprises seront prêtes quand la technologie sera mise au point », illustre la directrice de Calcul Québec.

Le quantique au service de l’IA

Le développement de l’intelligence artificielle tirera également profit de la technologie quantique, notamment dans les domaines de l’imagerie médicale, de la finance, du développement pharmaceutique, de l’aéronautique et du cryptage, estime Suzanne Talon.

« L’intelligence artificielle, c’est essentiellement un problème d’optimisation, résume la directrice. Quand on parle d’un modèle [conversationnel] à la ChatGPT, on calcule quel est le mot qui est le plus probable d’aller à la suite des mots insérés. »

Présentement, le Québec compte deux ordinateurs quantiques du même type. L’un d’entre eux est situé au Centre de recherche et développement pour la défense de Valcartier, alors que le second est l’ordinateur d’IBM à Bromont, en cours d’installation. L’ordinateur Monarq, conçu par l’entreprise Anyon, s’installera dans les locaux de Calcul Québec à l’ETS d’ici janvier prochain et sera le troisième ordinateur quantique en activité sur le territoire québécois.

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