Les séparatistes du Haut-Karabakh déposent les armes et discuteront avec l’Azerbaïdjan

Une fillette enlace une femme à  Stepanakert, capitale du Haut-Karabakh.
Siranush Sargsyan Associated Press Une fillette enlace une femme à Stepanakert, capitale du Haut-Karabakh.

Un cessez-le-feu a été annoncé mercredi au Haut-Karabakh où les séparatistes arméniens ont accepté de déposer les armes et des négociations sur la réintégration de ce territoire à l’Azerbaïdjan, au lendemain du déclenchement d’une offensive militaire d’envergure.

Cette annonce est une victoire majeure pour le président azerbaïdjanais Ilham Aliev dans sa volonté de prendre le contrôle de cette région disputée depuis des décennies entre Bakou et l’Arménie et théâtre de deux guerres, l’une de 1988 à 1994, l’autre à l’automne 2020.

Cette fois-ci, un assaut militaire azerbaïdjanais de 24 heures aura suffi à faire plier les séparatistes acculés par la puissance de feu de Bakou et la décision de l’Arménie de ne pas leur venir en aide. Le bilan humain s’établit lui pour l’instant à 32 morts.

« Un accord a été conclu sur le retrait des unités et des militaires restants des forces armées de l’Arménie […] et sur la dissolution et le désarmement complet des formations armées de l’Armée de défense du Haut-Karabakh », a indiqué la présidence séparatiste dans un communiqué.

Elle a annoncé en outre de premiers pourparlers concernant « la réintégration » à l’Azerbaïdjan de ce territoire où les tensions s’intensifiaient ces derniers temps. Ils doivent se dérouler jeudi dans la ville azerbaïdjanaise de Yevlakh, située à 295 km à l’ouest de Bakou.

Dans une allocution à la nation mercredi, le premier ministre arménien, Nikol Pachinian, a déclaré que son pays n’avait « pas participé » à la rédaction de l’accord de cessez-le-feu.

« Nous avons pris note de la décision des autorités du Karabakh de cesser les hostilités et de déposer les armes », et a-t-il affirmé à la télévision, ajoutant que l’Arménie n’avait plus d’unités militaires dans la région depuis août 2021.

Il est « très important » que les combats cessent dans cette enclave, a-t-il ajouté.

L’opposition reproche à M. Pachinian, qui avait dénoncé la veille des appels à un « coup d’État » dans son pays, d’avoir été responsable de la défaite militaire en 2020. Des heurts ont opposé mardi à Erevan des manifestants le qualifiant de « traître » et exigeant sa démission devant le siège du gouvernement.

Selon les séparatistes, ce cessez-le-feu a été décidé après une médiation des forces russes de maintien de la paix déployées dans le territoire depuis le dernier conflit il y a trois ans.

 

Dans la foulée des séparatistes, le ministère azerbaïdjanais de la Défense a confirmé le désarmement des forces du Karabakh dans le cadre d’une trêve qui devait entrer en vigueur à 13 h, heure locale, ainsi que l’ouverture de ces négociations.

Le précédent conflit au Haut-Karabakh, région sécessionniste d’Azerbaïdjan en majorité peuplée d’Arméniens et disputée avec Erevan depuis des décennies, avait duré six semaines à l’automne 2020 et s’était soldé par une déroute militaire arménienne et le déploiement de soldats de maintien de la paix russes dans la région.

Au moins 32 morts

 

Dans ses premières déclarations depuis le lancement de l’offensive de Bakou, Ilham Aliev avait affirmé un peu plus tôt mercredi que son assaut s’arrêterait « si (les séparatistes arméniens) déposent les armes ».

Les autorités azerbaïdjanaises avaient annoncé mardi le lancement d’une opération « antiterroriste » au Haut-Karabakh après la mort de six personnes dans l’explosion de mines posées, selon elles, par des « saboteurs » arméniens.

Selon le défenseur des droits humains en Arménie, les combats ont fait au moins 32 morts, dont deux enfants, et plus de 200 blessés.

 

Les autorités séparatistes arméniennes avaient annoncé pour leur part l’évacuation mardi de plus de 7000 civils de 16 localités tandis que le contingent de la paix russe présent au Haut-Karabakh a évacué de son côté plus de 2000 civils des zones les plus dangereuses, selon le ministère russe de la Défense.

Les séparatistes ont affirmé que plusieurs villes du Haut-Karabakh, dont sa capitale Stepanakert, avaient été ciblées par des « tirs intensifs » des forces militaires de Bakou visant aussi des infrastructures civiles. La mairie de Stepanakert avait appelé mercredi matin ses habitants à rester dans les abris et à ne pas fuir.

« Faire taire les armes »

La reprise des hostilités dans ce territoire, qui s’est invitée à l’Assemblée générale de l’ONU à New York, a provoqué l’émoi de la communauté internationale.

Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a appelé « dans les termes les plus forts, à un arrêt immédiat des combats, à la désescalade et au respect plus strict du cessez-le-feu de 2020 et des principes du droit international humanitaire ».

La France a dénoncé de son côté une offensive « illégale » et « injustifiable » de Bakou.

À la fin de son audience hebdomadaire au Vatican, le pape François a quant à lui appelé mercredi à « faire taire les armes ».

La Russie avait également exhorté mercredi matin à « cesser immédiatement l’effusion de sang, à mettre un terme aux hostilités et à arrêter les pertes civiles ».

Quant à l’Arménie, qui a dénoncé une « agression de grande ampleur » à des fins de « nettoyage ethnique », elle a assuré ne pas avoir de troupes au Haut-Karabakh, laissant entendre que les séparatistes avaient combattu seuls face aux soldats azerbaïdjanais.

Les tensions s’aggravaient depuis des mois autour de ce territoire qui a déjà été au coeur de deux guerres entre Erevan et Bakou.

À voir en vidéo