Québecor cesse de payer son loyer à l’Assemblée nationale

À l’heure actuelle, une quinzaine de médias membres de la Tribune de la presse louent des locaux dans l’édifice André-Laurendeau, adjacent au parlement du Québec (sur la photo).
Baker Jarvis Getty Images iStockphoto À l’heure actuelle, une quinzaine de médias membres de la Tribune de la presse louent des locaux dans l’édifice André-Laurendeau, adjacent au parlement du Québec (sur la photo).

Face à des résultats financiers en chute libre, Québecor a décidé d’arrêter de payer le loyer de son bureau à l’Assemblée nationale et demande aux parlementaires de rendre les locaux accessibles gratuitement aux médias.

« La décision de permettre l’accès à ces locaux sans frais serait là une action tangible au soutien des médias d’ici de la part de l’Assemblée nationale du Québec », écrit Jad Barsoum, vice-président aux affaires institutionnelles de Québecor, dans une lettre envoyée lundi au secrétaire général de l’Assemblée nationale, Siegfried Peters, ainsi qu’aux parlementaires — et dont Le Devoir a obtenu copie.

Québecor dit dépenser plus de 100 000 $ par année (soit 8448 $ par mois) pour louer un espace dans l’édifice André-Laurendeau, adjacent au parlement. Ce local accueille les journalistes du réseau TVA, du Journal de Montréal, du Journal de Québec, du 24 heures et de l’agence QMI qui couvrent les travaux parlementaires. « Le loyer exigé par votre direction […] va à l’encontre des principes d’accès et nuit à la vie démocratique », indique Québecor.

La décision de permettre l’accès à ces locaux sans frais serait là une action tangible au soutien des médias d’ici de la part de l’Assemblée nationale du Québec.

 

À l’heure actuelle, une quinzaine de médias membres de la Tribune de la presse, dont Le Devoir, louent des locaux dans l’édifice André-Laurendeau. Le prix des baux varie en fonction de la taille de l’espace loué.

Une « grave crise »

Dans sa lettre, le vice-président aux affaires institutionnelles de Québecor fait valoir que les médias traditionnels traversent une « grave crise » depuis plusieurs années, leurs revenus publicitaires ayant diminué radicalement avec l’arrivée des GAFAM.

« La crise des revenus publicitaires qui s’abat sur les entreprises de presse a de lourdes conséquences sur elles. Au cours des derniers mois, Québecor a dû procéder à la suppression de 240 postes. Bell Média a, quant à elle, aussi supprimé un millier de postes et six stations de radio.    Postmedia a mis à pied 11 % de son personnel des salles de rédaction », peut-on lire.

L’homme ne manque pas non plus de rappeler la récente décision de Meta de mettre définitivement fin à l’accès aux nouvelles sur ses plateformes Facebook et Instagram partout au Canada. Une décision qui fragilise d’autant plus tout l’écosystème médiatique. La situation a « pour conséquences de miner l’accès à l’information des citoyens et de manière plus globale la santé de notre démocratie ».

L’entreprise de Pierre Karl Péladeau soutient avoir informé « en vain » la direction de la gestion immobilière et des ressources matérielles de l’Assemblée nationale du Québec des difficultés vécues par les médias, espérant pouvoir renégocier le montant de loyer exigé.

Contactée par Le Devoir, Québecor n’a pas souhaité commenter davantage le dossier.

La Tribune de la presse, qui accrédite les journalistes travaillant à l’Assemblée nationale, a préféré ne pas s’avancer sur le sujet pour le moment. Son président, Olivier Bossé, tient simplement à rappeler que son organisation « défend les droits et privilèges des journalistes au Parlement ». « Ce sont les journalistes qui sont membres de la Tribune, et non les médias. Pour cette raison, l’enjeu de la gestion des baux relève de l’administration des médias », précise-t-il.

Trouver une solution « convenable pour tous »

Joint par Le Devoir, le Parti libéral du Québec a affirmé que la lettre envoyée par Québecor fait état d’une réalité « qui frappe les médias traditionnels ». « À cet effet, il est important d’explorer diverses avenues visant à les soutenir et de trouver une solution convenable pour tous », a souligné Maxime Doyon-Laliberté, attaché de presse du chef de l’opposition officielle, Marc Tanguay.

La whip de Québec solidaire, Alejandra Zaga Mendez, a pour sa part soutenu qu’il s’agit d’un « enjeu auquel on doit porter une attention particulière ». « Il est important qu’on en discute avec l’ensemble des membres du Bureau de l’Assemblée nationale », a-t-elle précisé.

De son côté, le Parti québécois n’a pas voulu émettre de commentaires. La présidence de l’Assemblée nationale a également refusé de se prononcer.

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