Québec choisit son seuil d’immigration à l’aveugle, selon les milieux d’affaires

Le président du Conseil du patronat du Québec, Karl Blackburn, lors d’une conférence de presse le 29 juin dernier
Christinne Muschi La Presse canadienne Le président du Conseil du patronat du Québec, Karl Blackburn, lors d’une conférence de presse le 29 juin dernier

Québec sonde ces jours-ci la société civile pour établir ses seuils d’immigration. En faut-il 50 000 ou 60 000 par année ? Ces chiffres ne veulent rien dire, a répondu jeudi le milieu d’affaires. « La capacité d’accueil n’est basée en fait sur rien », affirme le Conseil du patronat du Québec.

La communauté des gens d’affaires « se bute parfois à un certain mur d’opacité » en matière d’immigration, a soutenu jeudi Charles Milliard de la Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ) lors de la consultation générale du gouvernement sur le sujet.

Un tableau de bord gouvernemental en immigration s’impose pour éclaircir le portrait de ces nouveaux arrivants, comme le fait le ministère de la Santé. Sans cela, poursuit-il, « on est dans un débat beaucoup trop émotif, pas assez scientifique ».

Quelques minutes plutôt, le Conseil du patronat abondait dans le même sens. Le seuil de 60 000 immigrants par année au Québec n’est qu’un plancher. Le plafond doit être déterminé par « le marché de l’emploi ».

« La capacité d’accueil, c’est celle qu’on peut bien se donner », a plaidé son président, Karl Blackburn. « Malheureusement, dans certains cas, des gens ont une vision sur la capacité d’accueil ; en pensant que ces gens-là viennent consommer des services publics et ne contribuent pas à l’essor de notre société. Nous, c’est le contraire, nous pensons que la capacité d’accueil n’est basée en fait sur rien. Les travailleurs immigrants, oui, peuvent venir consommer des services, mais peuvent contribuer de façon significative à notre capacité à déployer des services. »

La FCCQ a énoncé quelques indicateurs qui préciseraient cette capacité d’intégration : accès au logement, accès aux cours de francisation, accès au transport en commun, accès à un service de garde, accès à un médecin de famille.

« Ce dont on a besoin, c’est d’avoir des données claires », a résumé Alexandre Gagnon, vice-président travail et capital humain à la FCCQ. « Si aujourd’hui, il nous manque 500 logements dans une région et que l’on fait des investissements majeurs, ça va être quoi les répercussions dans un an ? Ça va être quoi les répercussions dans deux ans ? Est-ce que les investissements qu’on a faits ont atteint les résultats ? »

Manufacturiers et exportateurs du Québec a clos cette journée d’audience en suggérant aussi « des paramètres clairs sur ce qu’on entend par capacité [d’accueil] » tout en avançant un seuil bien au-delà des options proposées par Québec. Ces représentants des usines québécoises demandent un seuil de 90 000 personnes « pour atténuer les impacts de la pénurie de main-d’oeuvre ».

Ce reportage bénéficie du soutien de l’Initiative de journalisme local, financée par le gouvernement du Canada.



À voir en vidéo