Pour un été de culture à l’école!

«L’art sous toutes ses formes est aussi essentiel que l’activité physique pour notre santé», écrivent les auteurs.
Photo: Getty Images «L’art sous toutes ses formes est aussi essentiel que l’activité physique pour notre santé», écrivent les auteurs.

À l’heure du déconfinement graduel, l’annonce de l’ouverture des camps de jour cet été a été reçue comme une véritable bouffée d’oxygène, dont vont profiter, espérons-le, le plus possible d’enfants, de jeunes et de parents ! Le premier ministre, le bon docteur Arruda ainsi que les pédiatres ont justifié leur décision en soulignant l’importance capitale de la socialisation et du jeu dans le développement des jeunes enfants. Personne ne contestera les bienfaits de cette heureuse initiative, qui mériterait d’être étendue afin d’offrir, durant la période estivale, des ateliers culturels dans les écoles primaires et secondaires, animés par des professionnels des arts et de la culture. Une fenêtre vient de s’ouvrir avec la réouverture prochaine des musées, des bibliothèques et des cinéparcs, mais cela ne suffit pas !

L’art sous toutes ses formes est aussi essentiel que l’activité physique pour notre santé. De nombreuses disciplines artistiques (la danse, la musique, le chant, le théâtre, la peinture) animent autant le corps que l’esprit, et elles peuvent se pratiquer en respectant les nouvelles règles sociosanitaires. Qu’aurait été notre période de confinement sans le partage des créations artistiques de toutes formes qui ont fleuri sur nos écrans et trouvé place dans nos médias ? La place accordée à l’accès à la culture par rapport à l’accès aux autres secteurs d’activité jugés plus ou moins essentiels dans les calendriers de déconfinement des différents pays est révélatrice de choix sociétaux. Pourquoi la réouverture des musées et des salles de spectacle devrait-elle nécessairement passer après celle des magasins, des terrains de golf et des salons de toilettage pour animaux ?

Le comédien français Philippe Torreton a fait cette proposition forte au président Macron : que la réouverture des écoles dans l’Hexagone se fasse en laissant une place importante aux activités culturelles et que les artistes au statut précaire occupent une place permanente dans les milieux scolaires pour y travailler en collaboration avec les personnes enseignantes.

Depuis le rapport Parent, les gouvernements successifs ont affiché une volonté politique de renforcer les liens entre culture et éducation. La nouvelle politique culturelle du Québec s’inscrit dans cette vision, et des moyens financiers ont été dégagés pour permettre à tous les élèves du Québec de bénéficier de sorties culturelles et de vivre des expériences culturelles significatives. La réalité demeure toutefois très variable dans ce domaine d’un établissement scolaire à l’autre.

Allons plus loin ! Soyons audacieux, débrouillards et créatifs ! Ouvrons les écoles dès cet été ! Mobilisons les acteurs des milieux de l’éducation et de la culture pour offrir, en complément des activités habituellement proposées au sein des camps de jour, partout à travers le Québec et en particulier dans les régions éloignées et dans les quartiers défavorisés des grandes villes, des activités culturelles variées, assurées en partenariat par des professionnels des arts et de l’éducation.

Des réflexions sont en cours pour éventuellement organiser, durant ces vacances, des cours de rattrapage dans les matières de base pour les élèves en difficultés d’apprentissage. Si l’on souhaite vraiment éviter le décrochage de ces élèves vulnérables, accrochons-les en leur proposant aussi des activités qui leur permettront de s’initier à diverses disciplines artistiques et de s’engager dans des projets de création. Plusieurs recherches ont fait la preuve que, si les activités culturelles sont intégrées dans les cursus scolaires et associées à l’apprentissage des autres matières scolaires, elles constituent un levier essentiel de motivation pour de nombreux élèves et contribuent fortement à leur bien-être à l’école et en dehors de celle-ci.

Faisons en sorte que l’école de demain, qui sera en partie celle de la distanciation physique, soit également un lieu unique de rapprochement et d’épanouissement par la culture et les arts !

*Cette lettre est cosignée par : Myriam Lemonchois, professeure à la Faculté d’éducation de l’Université de Montréal; Marie-Christine Beaudry, professeure à la Faculté d’éducation de l’Université du Québec à Montréal; Frédéric Bélanger, auteur, acteur, metteur en scène et directeur de théâtre; Marie-Annick Lépine, multi-instrumentiste des Cowboys Fringants; Naomi Fontaine, autrice et enseignante de français au secondaire; David Goudreault, écrivain et travailleur social.

Ce texte fait partie de notre section Opinion qui favorise une pluralité des voix et des idées en accueillant autant les analyses et commentaires de ses lecteurs que ceux de penseurs et experts d’ici et d’ailleurs. Envie d’y prendre part? Soumettez votre texte à l’adresse opinion@ledevoir.com. Juste envie d’en lire plus? Abonnez-vous à notre Courrier des idées.

À voir en vidéo