Une rentrée parlementaire sur les thèmes de l’identité de genre et de l’inflation

Le premier ministre François Legault, répondant à l’opposition lors de la période des questions mardi
Jacques Boissinot La Presse canadienne Le premier ministre François Legault, répondant à l’opposition lors de la période des questions mardi

Le débat sur l’identité de genre a pris le pas sur les attaques des partis de l’opposition pressant le gouvernement d’en faire plus contre l’inflation, mardi, à l’occasion d’une rentrée parlementaire marquée en fond de scène par une élection partielle chaudement disputée.

Quelques jours après que les membres du Parti conservateur du Canada (PCC) eurent fait entendre leur souhait de limiter l’accès aux recours médicaux de changement de sexe, des élus de la Coalition avenir Québec (CAQ) et du Parti québécois (PQ) ont proposé mardi d’encadrer l’influence des concepts d’identité de genre dans les écoles du Québec.

« Je pense qu’il faut qu’on ouvre une réflexion », a soutenu la ministre responsable de la Condition féminine, Martine Biron.

Évoquant lui aussi la nécessité de définir un cadre, le ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, s’est prononcé contre la décision récente d’une école de Rouyn-Noranda de transformer ses salles de bains genrées en bloc sanitaire mixte. « À un moment donné, les garçons et les filles ont le droit d’avoir leur espace », a-t-il dit.

Le chef intérimaire du Parti libéral du Québec, Marc Tanguay, s’est montré de cet avis. « Les toilettes pour garçons, pour filles, il faut que ça reste », a-t-il dit en se montrant ouvert à des « ajustements ».

Le chef du PQ, Paul St-Pierre Plamondon, a lancé le bal en répondant à des questions à ce sujet lors d’un point de presse. Il a suggéré de mandater une commission parlementaire en bonne et due forme sur l’identité de genre et les idéologies « en provenance de la gauche radicale ». « C’est là que j’ai un enjeu. Lorsqu’on impose des concepts, des manières de faire, des nouveaux programmes dans le système d’éducation, sans aucun débat démocratique », a-t-il dit.

« Ce genre de questions là, les toilettes [mixtes], les pronoms, les nouvelles théories d’écriture inclusive, doivent être débattues ici, à l’Assemblée nationale », a affirmé le dirigeant péquiste.

Des propos qui lui ont valu quelques pointes de la part du co-porte-parole de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois. « C’est [Pierre] Poilievre ou M. Plamondon qui a dit ça ? », a-t-il lancé avec ironie mardi en référence au chef du PCC.

L’élu solidaire a appelé ses adversaires politiques à « laisser ces enfants-là tranquilles ». « Les enfants trans ont huit fois plus de chances de se suicider que les autres enfants. Ça, ce n’est pas l’idéologie de la gauche radicale, c’est un fait », a-t-il affirmé.

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Le pouvoir d’achat

En Chambre, le premier ministre François Legault a affirmé que son gouvernement avait adopté ces derniers mois un train de mesures financières qui ont eu pour effet de retourner dans les poches des Québécois un montant sans précédent. « Seulement pour l’année 2023-2024, si on compare avec quand on est arrivés au gouvernement, les Québécois ont 7,2 milliards de plus dans leurs poches à chaque année », a-t-il déclaré en répondant au PQ.

La semaine dernière, M. Legault n’a pas exclu l’envoi de nouveaux chèques à des groupes laissés pour compte par les mesures qu’il a mises de l’avant ces derniers mois. Un élargissement de cette aide pourrait être lié aux décisions de la Banque du Canada.

Alors que le ministre des Finances, Eric Girard, a pour sa part exclu l’envoi de nouveaux chèques, M. Nadeau-Dubois a affirmé que la situation commande des gestes. « Quand Eric Girard dit “on en a fait assez”, il n’y a personne qui le croit au Québec. Suffit d’aller se promener dans une épicerie, suffit d’aller se promener sur un milieu de travail, les gens n’arrivent plus », a-t-il dit en point de presse.

M. St-Pierre Plamondon a affirmé que malgré l’envoi de deux chèques par le gouvernement, le dernier en décembre, la situation des Québécois est toujours aussi difficile. « On regarde la hausse des taux d’intérêt, puis la hausse des loyers, les gens font le calcul, puis évidemment ils en arrivent à la conclusion qu’ils sont plus pauvres que l’an dernier, dans la grande majorité des cas », a-t-il dit.

On regarde la hausse des taux d’intérêt, puis la hausse des loyers, les gens font le calcul, puis évidemment ils en arrivent à la conclusion qu’ils sont plus pauvres que l’an dernier, dans la grande majorité des cas.

M. Tanguay a pour sa part affirmé que le gouvernement québécois devait aider les plus vulnérables. « Il est clair que pour les familles il y a un recul du pouvoir d’achat, mais le coût de la vie vient impacter tout le monde et surtout les plus vulnérables, le gouvernement doit les aider de façon précise », a-t-il dit.

Le cas de Meta

 

M. St-Pierre Plamondon a par ailleurs accusé QS de tenir un double discours en raison d’un placement publicitaire sur Facebook dans le cadre de la campagne électorale dans la circonscription de Jean-Talon, à Québec, où un vote est prévu le 2 octobre. « Tu as des partis politiques qui, pour faire un petit gain de 1 % ou 2 % dans une partielle, sont prêts à abandonner tous leurs principes puis à laisser tomber nos médias québécois au profit d’une multinationale. Et je parle particulièrement de Québec solidaire, solidaire des multinationales. »

Les partis politiques québécois avaient adhéré à un boycottage en raison de la décision de Meta, qui exploite Facebook, de cesser la diffusion d’articles des médias canadiens après l’adoption d’un projet de loi fédéral.

M. Nadeau-Dubois a affirmé que dans le cas de l’élection partielle, ce boycottage a ses limites. « On va continuer d’y aller parce que c’est important pour la démocratie québécoise que les jeunes et les moins jeunes soient rejoints par les partis politiques », a-t-il dit.

M. Tanguay a repris le même argument. « Le 3 octobre, le lendemain du 2, on va revenir à la suspension complète, mais, pour l’instant, nous devons rejoindre les électeurs », a-t-il expliqué.

M. Legault a demandé à ses deux adversaires de cesser cette publicité sans quoi la CAQ reverrait sa stratégie, qui ne prévoyait pas de faire de publicité sur Meta jusqu’ici. « Ça n’a pas de bon sens que deux partis, le PLQ et QS, utilisent Facebook, Meta, et que deux autres, le PQ et la CAQ, ne l’utilisent pas. Ce n’est pas équitable », a-t-il dit.

Tous les partis respecteront une journée de boycottage le 15 septembre, à l’invitation notamment de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec.

Avec Marie-
Michèle Sioui
et Marco Bélair-Cirino

Une situation délicate, mais pas de blâme pour Jolin-Barrette

Le ministre de la Justice, Simon Jolin-Barrette, n’a pas commis de manquement éthique en nommant un ami juge à la Cour du Québec. Mais il s’est tout de même retrouvé dans une situation créant une apparence de conflit d’intérêts, a conclu la commissaire à l’éthique de l’Assemblée nationale, Ariane Mignolet.

Mme Mignolet observe qu’il n’existe actuellement pas de règle permettant à un ministre de se récuser pour éviter ce genre de situation. Elle suggère aux élus de réfléchir à un mécanisme en ce sens.

« Le ministre n’a pas favorisé les intérêts du juge Gosselin d’une manière abusive. Il s’est cependant retrouvé, par la force des choses, dans une situation délicate qui alimente l’apparence de conflit d’intérêts en raison de son lien de proximité significatif avec le juge Gosselin », note-t-elle.

Au terme d’un processus de sélection indépendant, M. Jolin-Barrette a soumis en mai le nom de Marc-André Gosselin pour un poste à la Chambre criminelle et pénale que ce dernier occupe depuis.



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