Métro Média sera mis en faillite

L’entreprise Métro Média mettra la clé sous la porte la semaine prochaine.
Annik MH de Carufel Archives Le Devoir L’entreprise Métro Média mettra la clé sous la porte la semaine prochaine.

« Il n’y avait tout simplement plus d’avenir pour nous ». Le président-directeur général, Andrew Mulé, a passé les derniers mois à tenter de trouver une solution de sauvetage de l’entreprise, qui comprend le quotidien Métro et 16 hebdomadaires locaux, en vain. Ses 70 employés, dont une trentaine de journalistes, ont appris dimanche que leur mise à pied serait « définitive ».

Rappelons que Métro Média avait annoncé le 12 août dernier la suspension immédiate de ses activités. Depuis, M. Mulé gardait espoir de trouver de nouveaux bailleurs de fonds. Or, il a confirmé sur X, dimanche, que « la décision de procéder à la cession volontaire des actifs de Métro Média a été entérinée ». L’entreprise sera mise en faillite « la semaine prochaine ».

En entrevue avec le Devoir, le président-directeur général déplore « une grande perte pour la démocratie et le journalisme local ». « On a trop parlé de la fin du Publisac et des difficultés de l’entreprise. Aujourd’hui, il faut avoir un débat constructif sur l’avenir des médias locaux. L’industrie va très mal. Donner aux médias les moyens de faire leur travail, c’est un choix de société. »

M. Mulé dénonce toujours la décision de l’administration de Valérie Plante de mettre fin à la distribution du Publisac sur l’île de Montréal. Il s’agit selon lui de la principale raison de la faillite de l’entreprise, même s’il reconnaît sa « part de responsabilités ». « Si j’ai commis des erreurs, c’est par passion, par excès, mais jamais par appât du gain, par cupidité », s’est-il défendu sur X.

« Une distraction »

Le 18 août, Le Journal de Montréal avait révélé que Michael Raffoul, le propriétaire de Métro Média, s’est versé un dividende de 2,57 millions de dollars en août 2021, seulement quelques mois avant le début des difficultés financières de l’entreprise.

« L’article du Journal de Montréal, ça a été une distraction qui a nui à nos démarches avec des intervenants clés, dont le gouvernement, pour trouver une solution, soutient M. Mulé. Tout le monde était au courant depuis des mois », dit-il, regrettant le « timing » de la publication de l’article et un « manque de solidarité ».

La même journée, le Parti libéral du Québec avait demandé au gouvernement Legault d’accorder une aide d’urgence d’un million de dollars à l’entreprise. Le 30 août, le ministre de la Culture et des Communications, Mathieu Lacombe, a fermé la porte à cette aide supplémentaire, évoquant le dividende de M. Raffoul. « C’est une crise à l’intérieur du média, plutôt que la crise des médias, dans ce cas précis. Je pense que c’est important de faire la part des choses », avait déclaré le ministre.

Métro Média avait auparavant demandé 500 000 $ de plus à l’État québécois, sans succès. Dans le cadre du Programme d’aide à l’adaptation numérique des entreprises de presse d’information écrite du gouvernement du Québec, elle avait déjà obtenu 393 575 $ en 2020-2021, puis 348 845 $ en 2021-2022, 394 821 $ en 2022-2023 et 313 276 $ en 2023-2024.

Situation « difficile » pour les employés

Zoé Magalhaes, journaliste et présidente du syndicat des journalistes du quotidien Métro, soutient que la nouvelle a été « difficile à encaisser » pour elle et ses collègues, dimanche matin. « La plupart des employés s’y attendaient, mais c’est quand même une grosse perte, non seulement pour nous, mais pour tout le journalisme local au Québec. »

Métro Média a été créé en avril 2018, au moment de l’acquisition du Journal Métro, ainsi que de 11 publications montréalaises et de 5 de la région de la Capitale-Nationale. Certaines d’entre elles étaient demeurées en activité pendant près de 100 ans.

« C’est vraiment dommageable, parce qu’on était le principal interlocuteur de beaucoup de gens, déplore Mme Magalhaes. On était les seuls à scruter la politique des arrondissements et à couvrir certains territoires. J’espère que l’information locale ne va pas disparaître complètement. »

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