Îles Féroé: l’archipel grandiose du bout du monde

Gary Lawrence
Collaboration spéciale
L’île de Kalsoy avec, en arrière-plan, l’île de Kunoy
Photo: Gary Lawrence L’île de Kalsoy avec, en arrière-plan, l’île de Kunoy

Ce texte fait partie du cahier spécial Plaisirs

Des îles subarctiques fantasmagoriques, des fjords féeriques aux falaises insensées, des villages et des hameaux mignons comme tout et une ravissante capitale en miniature : les îles Féroé forment une sorte de paradigme de la félicité nordique en mer scandinave.

Il faut parfois avoir la foi en arrivant aux îles Féroé. Car avec 260 jours de pluie par année et 12 degrés ambiants en moyenne l’été, il arrive que l’envie de se claquemurer prévale sur celle d’aller se balader. Ce serait pourtant là une grave erreur.

Sur cet incroyable archipel de 18 îles et îlots couvrant 1400 km2, la météo est bipolaire et aussi imprévisible qu’instable, peu importe où l’on se trouve. Pour la conjurer, il suffit parfois de sauter dans sa voiture et de partir en quête d’une embellie. Et quand les bancs de nuages se dissipent, on bénit le ciel (dégagé) de nous avoir laissés persévérer, car les décors naturels sont ici totalement spectaculaires.

Valhalla scénique

En traquant la lumière jusque dans ses derniers retranchements, on finit toujours par la trouver. Elle est tantôt ici, éparpillée sur des falaises taillées d’un coup de tranchoir céleste ; tantôt là, tavelant une église au toit emperlousé ; ou là encore, illuminant une maison de pierres viking ou la bruine d’une cascade qui ruisselle sur l’impénétrable basalte.

Nul besoin de rouler longtemps pour s’en mettre plein les mirettes : à 11 kilomètres de l’aéroport de Vagar, la splendissime chute Mulafossur se précipite dans la mer depuis un promontoire vertigineux. Non loin de là, une heure de marche mène à Leitisvatn et à son lac qui semble flotter en apesanteur au-dessus de l’océan.

Sur l’île d’Eysturoy, le ravissant hameau de Saksun et ses demeures vikings groupées au pied d’une gracieuse cascade servent de point de départ à l’un des innombrables sentiers panoramiques féroïens. Si plusieurs parcours sont réservés aux mollets endurcis, bien d’autres sont aisément accessibles et permettent à quiconque d’atteindre une sorte de Valhalla scénique tout en demeurant sur Terre.

Photo: Gary Lawrence Une demeure du hameau de Saksun, sur l’île d’Eysturoy

Au départ de Klaksvik, sur l’île de Bordoy, 45 minutes de marche pépère mènent ainsi à l’inoubliable panorama à 360 degrés qu’offre le sommet du Klakkur. Devant, deux fjords enlacent l’île de Kunoy ; derrière, les pyramides naturelles des monts Hafjall et Halgafelli dominent les lieux, ponctués de moutons équilibristes à la longue tignasse rebelle — dans l’archipel, ils dépassent en nombre les 55 000 Féroïens.

Rien n’égale cependant la randonnée qui mène au phare de Kallur, sur la pointe septentrionale de l’île de Kalsoy : une haute muraille naturelle vertigineuse, des îles voisines dantesques qui défient la mer, des piliers minéraux où s’accrochent des lambeaux de brume… Près du phare, une pierre tombale se dresse, isolée : c’est « celle de James Bond », qui rappelle que c’est là, dans Mourir peut attendre, que l’agent 007 passe le Walther PPK à gauche.

Une propension au minuscule

Territoire autonome du royaume du Danemark — au même titre que le Groenland —, l’archipel des Féroé, jadis lieu d’ermitage pour des moines irlandais, a failli devenir indépendant en 2004, au terme d’un référendum aussi serré que celui du Québec, mais à l’inverse : 49,3 % pour le non et 50,7 % pour le oui, un résultat invalidé par le gouvernement danois « pour cause d’irrégularités ».

Difficile, cependant, d’en parler avec les habitants, car nombreux sont-ils à se cloîtrer derrière les volets peinturlurés de leurs jolies maisons de poupée, même l’été. Les longues nuits d’hiver auraient-elles forgé chez eux l’habitude de s’enfermer dans leurs réduits pour faire exulter leur hygge, cet art de vivre danois qui rappelle le cocooning ?

Si cette propension au minuscule ne se fait pas sentir à Kirkjubøur, où se trouve la « plus vieille maison de bois habitée au monde », elle se remarque à Tórshavn, la mégamignonne microcapitale. Dans le vieux quartier de Reyn, on croirait arpenter les rues d’un village de Lilliputiens, entre les coquettes maisonnettes bleu atlantique ou jaune moutarde. Même le siège du pouvoir féroïen, sur la pointe de Tinganes, est formé de microbâtiments. Comme si les Féroïens voulaient accentuer leur rapport au grandiose qui les entoure en vivant à l’opposé du spectre dimensionnel, dans des espaces exigus.

Photo: Gary Lawrence Tórshavn, la mégamignonne microcapitale

Le même syndrome de la petitesse tranquille se vérifie dans bon nombre de villages blottis au creux d’une vallée, au bout d’un fjord et dans l’échancrure d’une baie, un peu partout aux Féroé. La quintessence du genre revient à Gjógv, le village le plus photogénique (et le plus visité) de l’archipel.

Agglutinées au pied de montagnes blondes et glabres, ses maisons peintes en noir rappellent l’époque où on les enduisait de goudron pour les protéger des rudes éléments. Car même si les murailles de roc de l’île voisine de Kunoy s’élèvent droit en face, elles sont trop éloignées pour faire obstacle aux vents et à la pluie quand celle-ci tombe à l’horizontale.

Mais si le ciel se fâche ou si le brouillard persiste, il ne faut jamais oublier que le temps finit toujours par « beaucir » aux Féroé. Et qu’il suffit de garder la foi pour voir de nouveau ces îles magnifiées.

Pratico-pratique

• Les Féroé sont reliées par Atlantic Airways à plusieurs villes européennes, dont Copenhague, Reykjavik, Édimbourg, Barcelone et Paris (2 h 15 de vol), ainsi que New York dès le mois d’août. La meilleure période pour s’y rendre s’étend de mai à octobre, mais juillet et août sont très achalandés.

• Les routes sont impeccables et six îles sont reliées par un pont ou de longs tunnels, dont trois sont rattachés au seul carrefour giratoire sous-marin au monde. En roulant sans arrêt, on couvre l’essentiel du réseau routier en moins de trois jours.

• Pour dormir, deux bons points de chute : le très stylé (et très coûteux) hôtel Forroyar à Tórshavn et le fort bien situé Gjaargardur Guesthouse à Gjógv.

• Aux îles Féroé, les bonnes tables sont rares, mais le Roks de Tórshavn fait exception : oursins à la mousse de chou-fleur, tiradito de morue, pattes de crabe du Groenland, sorbet à la rhubarbe…

Le Petit Futé Danemark et îles Féroé est l’un des rares guides à aborder ces îles.

• Info : visitfaroeislands.com/en

Ce contenu a été produit par l’équipe des publications spéciales du Devoir, relevant du marketing. La rédaction du Devoir n’y a pas pris part.



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