La rentrée littéraire d’ici en 10 livres choisis

Les auteurs d’ici explorent les contradictions présentes et passées d’un monde en profonde mutation. 
Photo: Marie-France Coallier Le Devoir Les auteurs d’ici explorent les contradictions présentes et passées d’un monde en profonde mutation. 

Un lac le matin

Louis Hamelin

Après Jean-Jacques Audubon dans Les crépuscules de la Yellowstone (Boréal, 2020), Louis Hamelins’intéresse de nouveau à une figure tutélaire du mouvement écologiste, Henry David Thoreau. Figure mythique de la pensée contemporaine, père de la simplicité volontaire, le naturaliste américain prend vie dans toute sa complexité sous la plume virtuose du romancier. En scrutant les liens qui l’unissent à ses proches, Un lac le matin entremêle habilement histoire et fable pour explorer les contradictions d’un homme avide de liberté, mais influencé par le puritanisme de son époque.

Boréal, 3 octobre
  

Troubler les eaux

Frédérick Lavoie

En 2017, Frédérick Lavoie se rend au Bangladesh pour réaliser une série de reportages sur les enjeux liés à l’eau. Pendant qu’il récolte des témoignages, il ne peut s’empêcher de se questionner sur les limites et les écueils du journalisme de terrain. « Récit d’une collision avec l’opacité », Troubler les eaux rend compte des vertiges, des doutes et des éclats de lumière d’un journaliste qui abandonne ses certitudes pour entrer de plain-pied dans l’insoluble, et ainsi se rapprocher de la vérité dont héritera sa plume. L’auteur poursuit ici une réflexion essentielle sur la limite de l’expression et sur l’établissement des relations de pouvoir. Prenant.

La Peuplade, 27 septembre
 

Lourdes

Catherine Lemieux

Étudiante à l’Université de T… en Europe, Lourdes est ravie d’avoir pu se trouver un laissez-passer — à titre de préposée au buffet — pour le Symposium du Laboratoire du Néo-Moi Féminisant. Le congrès, qui porte sur « la force féminine » de la poète russe Razuvaeva, vise à analyser et à extraire la puissance matricielle de ses écrits. Satire habilement menée, Lourdes décortique avec humour et clairvoyance les forces discursives et autres IA qui dictent les croyances, restreignent les intuitions et contrôlent les champs de connaissance. Catherine Lemieux offre une réflexion faussement cynique sur les pièges où l’on s’enferme volontairement et un plaidoyer original et percutant pour la liberté de pensée.

Boréal, 19 septembre
 

Solène en trois actes

Alain Beaulieu

Format choral dans L’interrogatoire de Salim Belfakir (Druide, 2016), effets champ-contrechamp dans Le postier Passila (Druide, 2010), Alain Beaulieu est un maître des structures. Il le prouve encore une fois avec Solène en trois actes, qui prend la forme d’« un triptyque temporel aux allures de kaléidoscope ». À travers trois périodes marquantes de la vie du narrateur — l’adolescence, la quarantaine et la maladie —, l’écrivain interroge les chemins tortueux du hasard au coeur d’un Québec en profonde mutation.

Druide, 18 octobre
 

Ça aurait pu être un film

Martine Delvaux

C’est lors de recherches pour un scénario de film que Martine Delvauxa fait la rencontre de Hollis Jeffcoat. Cette peintre américaine, connue pour avoir contribué à la fin de l’union mythique entre Jean Paul Riopelle et Joan Mitchell, était aussi une grande artiste, une passionnée, une amoureuse. L’autrice de Blanc dehors (Héliotrope, 2015) a analysé tableaux, articles de journaux, entrevues et photographies pour mettre ensemble les fragments de l’histoire, et imaginer sa version d’Hollis Jeffcoat. Ça aurait pu être un film brode un portrait original et captivant, qui rend justice à celles qui créent dans l’ombre.

Héliotrope, 20 septembre
 

Qimmik 

Michel Jean

Avec Kukum (Libre expression, 2019), Michel Jean a ravivé l’intérêt du Québec — et bientôt du monde entier — envers l’histoire des peuples autochtones du Canada. Dans Qimmik, l’auteur innu dirige son regard vers le nord de la province, entre la taïga et la toundra. Une avocate est dépêchée sur la Côte-Nord pour représenter un Inuk accusé d’avoir tué d’anciens policiers. Sa quête de justice la mènera sur les traces d’un peuple libre et solidaire, et sur celles d’un territoire majestueux que les gouvernements successifs se sont évertués à effacer, à contraindre, à détruire. Avec un récit poignant et accessible à l’image de ceux qui ont fait sa marque, l’auteur martèle la vérité avec ouverture et bienveillance, le regard résolument tourné vers la suite du monde.

Libre expression, 18 octobre

Havre-Saint-Pierre

Abla Farhoud

Ultime roman de la regrettée Abla Farhoud, Havre-Saint-Pierre est un exemple probant de l’immense héritage qu’est l’oeuvre littéraire et dramaturgique de l’écrivaine québécoise d’origine libanaise. À travers les personnages de deux frères, et de leur soeur défunte, sur la tombe de qui ils veulent aller se recueillir, raison pour laquelle ils traversent le Québec en voiture, la romancière établit un dialogue sur les multiples voies de l’exil, de l’enracinement et de l’intimité. Elle offre un dernier livre doux-amer, où transparaissent son humour mélancolique, sa grande humanité et son insatiable curiosité.

VLB éditeur, 27 septembre
 

Une nuit de tempête

Yves Beauchemin

Véritable monument de la littérature québécoise, Yves Beauchemin est, avec sa Juliette Pomerleau, l’un des cinq Québécois à avoir accédé à la prestigieuse liste des nommés au prix Goncourt. À 82 ans, il dévoilera sous peu son douzième roman, Une nuit de tempête. Par une soirée hivernale comme il n’en existe qu’au Québec, un urgentiste vient en aide à un jeune homme blessé. Le médecin, ahuri, croit reconnaître en ce patient les traits de son frère depuis longtemps décédé. S’ensuit une aventure rocambolesque témoignant de l’insatiable énergie créative de son auteur.

Québec Amérique, 26 septembre
 

Kanatuut

Natasha Kanapé Fontaine

Natasha Kanapé Fontaine s’est inspirée de la façon de raconter et de penser le monde de ses ancêtres pour composer les nouvelles de Kanatuut, un recueil à l’orée du mythe et du conte. Fusionnant certains éléments de récits fondateurs innus à des apparitions tirées de ses propres rêves, elle bouscule les frontières de l’imaginaire et relate la réappropriation de soi, du territoire et d’une culture à travers sa réinvention et sa renaissance.

Stanké, 1er novembre
 

 

Mont Mirador

Myriam Beaudoin

Que restera-t-il de nous lorsque la planète aura atteint la limite de ses ressources ? L’espoir, selon Myriam Beaudoin. Dans Mont Mirador, roman dystopique et allégorique, l’autrice installe sa réflexion dans un village balayé par un tsunami de boue. Une femme et un enfant handicapé trouvent refuge dans une colline qui abrite un survivaliste méfiant et misanthrope. Rêvant de réparer les torts, l’étrange trinité s’invente la renaissance d’un monde laissé au bord du gouffre.

Leméac, 4 octobre



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