L’esprit d’équipe de Mirko D’Agata

Mirko D'Agata, chef exécutif chez Groupe no 900 et Morso pizzeria
Photo: Charles-Frédérick Ouellet Mirko D'Agata, chef exécutif chez Groupe no 900 et Morso pizzeria

Si on demande au chef Mirko D’Agata quelle est la meilleure façon d’attirer la main-d’œuvre, de nourrir la passion pour la restauration et de réjouir les gourmands, il dira un seul mot : pizza.

Lorsqu’on le rencontre dans le quartier Limoilou, à Québec, il finalise certains détails en vue de l’ouverture du quatrième restaurant Morso, consacré à la pizza romaine ; cette longue pâte rectangulaire garnie et servie al taglio, c’est-à-dire coupée selon l’envie.

Le chef réputé — Mirko D’Agata a gagné le prix de la meilleure pizza romaine au monde en 2019 à Naples — a toujours su que cette spécialité avait du potentiel. Lorsqu’il s’est joint à la famille no 900 à titre de chef exécutif en 2016, il a saisi l’occasion d’en faire un objet de destination à part entière. Selon lui, ce mets qui fait traditionnellement la part belle aux ingrédients modestes incarne la simplicité, le partage et la découverte. « Non seulement elle est belle visuellement, mais elle permet de jouer encore mieux avec les saveurs, les textures, et elle se réchauffe mieux que la napolitaine. C’est vraiment ma pizza préférée ! »

Faire germer la créativité

Riche de ses années d’expérience en tant que pizzaïolo et boulanger en Italie et à Montréal, à la tête de la pâtisserie-boulangerie Arte Farina, Mirko D’Agata a réussi à créer une pâte délicieuse, fermentée de 72 à 96 heures, « que tout le monde en cuisine peut réaliser ». Une base idéale pour toutes sortes de créations, et sans aucun doute l’un des ingrédients de son succès : impliquer son équipe dans la réussite de l’entreprise.

« J’ai eu la chance de travailler avec des gens qui m’ont appris plein de choses. C’est à mon tour de transmettre mes connaissances. Je leur donne une ligne directrice et des techniques pour partir, et ensuite on crée. Avoir une relation de développement avec les jeunes plutôt que d’imposer, c’est important pour moi. Et ça aide face à la pénurie de main-d’œuvre. Si la passion est là, il faut avoir de l’espace et du temps pour créer et apporter ses idées, parce que c’est la créativité que l’on veut dans une pizzeria. Il faut donner la place et l’envie de s’épanouir au travail. Sinon, on n’avance pas. »

Amateur de compétitions culinaires, Mirko D’Agata va même jusqu’à organiser ses propres concours dans les différentes succursales du Groupe no 900, et bientôt celles de Morso, pour solidifier l’esprit d’équipe. Les pizzas gagnantes sont ensuite mises en vedette dans les restaurants et participent au changement de menu usuel. En même temps, elles présélectionnent les collègues qui iront faire valoir leurs talents à l’international. « Je répète souvent que plusieurs cerveaux, c’est mieux qu’un seul. J’aime les sports d’équipe, j’aime travailler ensemble, j’ai besoin de contacts humains, des petites conversations près de la machine à café. La plupart des beaux projets que j’ai faits ont commencé sur le coin d’une porte. »

Son envie de redonner au suivant, il le fait une pizza à la fois. En plus de faire du bénévolat pour les gens dans le besoin, il a créé avec les confrères Stefano Faita et Michele Forgione la pizza « La collective » afin d’amasser des sous pour les travailleurs de la restauration qui avait des difficultés financières durant la pandémie. « Avec chaque pizza vendue en cinq mois, on a pu aider à la hauteur de 53 000 $. C’était une façon de les soutenir, d’être ensemble. »

Artisanale avant tout

Ce sentiment de collégialité, Mirko D’Agata le vit aussi dans ses relations avec les producteurs. Pour lui, il est essentiel que la carte blanche qu’on lui donne à titre de chef exécutif vienne avec des produits locaux et de saison. « Je veux faire un travail de chef, pas un travail de tableaux Excel et de “prix-cost” ! » lance-t-il d’ailleurs en riant. Mirko D’Agata n’hésite pas à décrire l’entreprise comme étant une chaîne artisanale dont le pouvoir d’achat lui permet d’acheter une grande quantité de produits de qualité. Il cite notamment les charcuteries, qui sont fabriquées en partenariat avec les Viandes biologiques de Charlevoix. « Je le dis tout le temps, la viande de porc au Québec, c’est quelque chose d’absolument merveilleux ! »

Photo: Charles-Frédérick Ouellet

Chef de la délégation canadienne de l’Association de la véritable pizza napolitaine (AVPN) et copropriétaire de la maison d’importation privée Forbita, M. D’Agata refuse d’être perçu comme un ambassadeur de son pays natal. « Apporter un peu d’Italie au Québec, absolument, mais les clients sont Québécois. Il faut comprendre où nous sommes, c’est important. »

Il se souvient d’une pizza très typique qu’il avait mise au menu, faite avec des gourganes, une sauce aux petits pois verts et pecorino. « Il n’y a pas plus classique ! Personne n’a aimé ! » Qu’à cela ne tienne, il a réussi à insuffler quelques subtilités de l’Italie tout en jouant avec des influences québécoises et des palettes de saveurs variées. La preuve : pour la compétition mondiale de la pizza à Parme — où il concourait cette semaine notamment pour le titre de meilleure pizza romaine —, sa version alliait l’omble chevalier d’Opercule et les micropousses Redfrog Lab, deux petites compagnies de Montréal. « Oui, la pizza est italienne, mais le Québec a tout pour les réussir. »

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