Revisiter «Hamlet» en dansant

Robert Lepage et Guillaume Côté en répétition pour Hamlet. Première ébauche
Photo: François Latulippe Robert Lepage et Guillaume Côté en répétition pour Hamlet. Première ébauche

Après une première collaboration sur Frame by Frame en 2018, le célèbre homme de théâtre Robert Lepage et le danseur de renom Guillaume Côté se retrouvent de nouveau à l’affiche. Cette fois-ci, ils s’attaquent à un classique théâtral et revisitent Hamlet de William Shakespeare. Ils profitent du 32e Festival des arts de Saint-Sauveur (FASS) pour en dévoiler une première ébauche.

Hamlet est intéressant parce qu’il est plus complexe, c’est un antihéros qui a parfois une personnalité horrible. J’avais envie depuis longtemps de pouvoir expérimenter ce rôle.

C’est un double rêve que Guillaume Côté réalise : travailler de nouveau avec Robert Lepage, l’une de ses idoles, et incarner Hamlet. « J’ai surtout incarné des princes, des romantiques, des héros durant ma carrière. Hamlet est intéressant parce qu’il est plus complexe, c’est un antihéros qui a parfois une personnalité horrible. J’avais envie depuis longtemps de pouvoir expérimenter ce rôle », raconte Guillaume Côté. Après une première collaboration « à succès » avec Robert Lepage, le danseur lui propose alors de travailler avec lui sur cette oeuvre. « On avait envie de travailler à nouveau sur quelque chose ensemble, alors je lui ai proposé Hamlet. J’adore la façon dont Robert [Lepage] travaille, c’est le genre de personne qui donne le temps à des gens avec qui il a vraiment une connexion, alors ça m’a vraiment touché qu’il accepte une nouvelle production », s’émeut le directeur artistique du Festival des arts de Saint-Sauveur.

Contrairement à leur première collaboration, Frame by Frame, où les deux hommes ont misé sur une production multidisciplinaire, avec beaucoup de décors, d’artistes sur scène, etc., le duo a cette fois-ci misé sur la simplicité. « On a commencé juste avec quelques danseurs, les corps, l’histoire et le décor, mais des choses vraiment basiques. Des tables, des chaises, des rideaux, des épées… rien d’extravagant, mais tout est devenu absolument magique ! Ce qui est le fun avec Robert [Lepage], c’est qu’il pousse tellement la créativité que justement, les éléments, très simples, sont devenus super complexes », explique M. Côté. Ainsi, certains éléments de décor sont amenés à se transformer, par exemple trois tables qui s’assemblent et deviennent une chapelle, puis un trône.

Avec cette nouvelle production, les deux artistes ont découvert leur complémentarité artistique. « Moi, j’aime ça parler entre les lignes. En danse, on aime l’abstrait, ce qui se passe subtilement entre le thème, l’histoire, les différents éléments… Je suis passionné par ça, et par la chimie entre les personnages. Robert [Lepage], lui, est plus dans l’explication, pour réussir à toucher quelque chose de précis, à amener le spectateur quelque part, à avoir les bonnes affaires au bon moment, à s’assurer de la cohérence. Il est maître de son craft. On se rejoint bien, dans le respect de nos arts respectifs, et ça me touche beaucoup », affirme-t-il.

Danser la narration

Pour leur version de Hamlet, Robert Lepage et Guillaume Côté ont décidé de se concentrer sur la danse seulement. « C’est beau, de travailler de cette façon-là. Parfois, on est dans des gros centres, avec beaucoup de ressources, de grandes attentes, de nombreux artistes et, des fois, on s’éloigne du noyau, du projet en tant que tel. C’est pour ça que j’ai fondé ma compagnie aussi, pour revenir un peu à l’essentiel », pense celui qui a fondé Côté Danse en 2021.

C’est une audience qui aime la danse, des gens connaisseurs, mais qui ont aussi un esprit plus expérimental. Sous le chapiteau, cette création va être intime, mais intense, donc c’est parfait pour Saint-Sauveur.

En se concentrant sur la danse, les deux créateurs espèrent « maximiser chaque personnage, chaque élément présent sur scène ». Sur le plan de la chorégraphie, Guillaume Côté est arrivé avec une idée « bien définie » dès le départ. Il s’est ensuite inspiré des danseurs, notamment grâce à des séances d’improvisation. « Je voulais trouver le vocabulaire du corps de chaque danseur, mais aussi analyser la synergie qui fonctionne entre les gens », dit-il. Par la suite, le chorégraphe a aussi utilisé la narration, l’histoire de Hamlet, pour créer du mouvement. « On a un récit à rendre, à comprendre, donc on a étudié [la pièce] scène par scène pour comprendre qui est le personnage, ce qu’il ressent et le sous-texte qui va avec », ajoute-t-il. Ainsi, M. Côté s’est tenu au texte de l’oeuvre originale, mais « s’est donné de la liberté » grâce à l’abstraction de la danse et à l’absence de textes parlés. Il a aussi voulu incarner l’histoire grâce aux danseurs eux-mêmes qui se retrouvent sur scène. « On a des danseurs de tous âges, et de styles vraiment différents. Ils portent alors des poids différents et deviennent des personnages incroyables sur scène », affirme-t-il.

Pour le directeur artistique, le FASS est « le meilleur endroit » pour présenter la première ébauche de Hamlet. « C’est une audience qui aime la danse, des gens connaisseurs, mais qui ont aussi un esprit plus expérimental. Sous le chapiteau, cette création va être intime, mais intense, donc c’est parfait pour Saint-Sauveur », pense-t-il. Guillaume Côté et Robert Lepage ont hâte que cette production se concrétise devant un premier public. Ils espèrent tous deux améliorer cette version, mais en sont déjà « très contents ». « Notre première ébauche est déjà une belle surprise, conclut-il. Est-ce que c’est ça le show final ? On ne sait pas, mais c’est déjà très satisfaisant ! »

Cinq spectacles à voir au Festival des arts de Saint-Sauveur

BODYTRAFFIC. La compagnie de Los Angeles BODYTRAFFIC propose un programme en quatre temps. Hommage à Peggy Lee, à James Brown, création très jazzy ou encore interrogation sur les relations humaines, les danseurs explorent de multiples univers, en gardant toujours leur contagieux dynamisme et une maîtrise impeccable de leur technique.
Le 29 juillet, sous le Grand Chapiteau


Family of Jazz, Decidedly Jazz Danceworks. Accompagnés de six musiciens sur scène, les danseurs de la compagnie Decidedly Jazz Danceworks prônent, comme leur nom l’indique, la danse jazz. Grâce à leur style percussif et très rythmique, ils sont réputés pour leur musicalité d’envergure. Une occasion assez rare de voir de la danse jazz de haut niveau !
Le 30 juillet, sous le Grand Chapiteau
 

Les sentiers de la danse. Nyata Nyata, Tentacle Tribe, Parts + Labour_Danse… Plusieurs compagnies de danse vont parcourir les parcs de Saint-Sauveur et de Sainte-Adèle pour proposer aux spectateurs des spectacles immersifs courts, et gratuits. Ainsi, plusieurs fois par jour, l’audience pourra choisir son parcours et décider quel voyage il décide de faire. Une belle façon de faire des découvertes !
Les 28, 29 juillet et 4, 5, 8 et 9 août
 

FASS Dance Battle. Pour une troisième année, une quinzaine de streetdancers s’affronteront lors d’un battle de danse au parc Georges-Filion. Break et popping seront à l’honneur cette année, et des artistes du Québec et de l’Ontario performeront devant le public. De quoi en prendre plein la vue et comprendre davantage cette culture.
Le 30 juillet, au parc Georges-Filion


A.I.M by Kyle Abraham. Créateur contemporain de renommée mondiale, Kyle Abraham dévoilera pour la toute première fois sa danse virtuose et bouillonnante au public du FASS. Inspiré par la culture et l’histoire afro-américaine, le chorégraphe mélange les styles. Du hip-hop au postmoderne en passant par le jazz, M. Abraham et les 10 artistes de sa compagnie présenteront plusieurs pièces de son répertoire.
Le 2 août, sous le Grand Chapiteau

 

Hamlet - Première ébauche

Une création de Guillaume Côté et Robert Lepage. Du 26 au 28 juillet sous le Grand Chapiteau du Festival des arts de Saint-Sauveur. 167, rue Principale, Saint-Sauveur



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