«KIN»: Réimaginer notre monde

Le collectif de danse contemporaine La Tresse en répétition de leur spectacle «Kin» dans les locaux de Louise Lapierre danse.
Photo: Valerian Mazataud Le Devoir Le collectif de danse contemporaine La Tresse en répétition de leur spectacle «Kin» dans les locaux de Louise Lapierre danse.

Près de quatre ans après son dernier spectacle en salle, La Tresse, collectif composé de Geneviève Boulet, Erin O’Loughlin et Laura Toma, revient sur scène avec KIN, dès le 19 avril à l’Agora de la danse. En plus d’avoir ouvert leur processus de création à des interprètes extérieurs à la compagnie, les trois artistes se sont questionnées sur le microcosme, ce qu’il contient, ce qu’il cache et sur l’intelligence de la nature.

« Notre point de départ, c’était d’amener d’autres voix avec nous. Travailler toutes les trois en tant que chorégraphes et interprètes, on a l’habitude, mais on voulait explorer l’idée de faire fonctionner La Tresse avec d’autres personnes, que tout le monde ait une voix, une place et qu’on se comprenne », se souvient Erin O’Loughlin lorsqu’elle parle du point de départ de KIN, fin 2020. En effet, pour les trois complices, créer un projet ensemble a toujours été « fluide ». Le fait d’intégrer deux autres artistes, à savoir Lucy M. May et Matthew Quigley, a cependant permis d’aller encore plus loin. « Ça nous a aidés à clarifier nos rôles aussi, à les consolider. En ouvrant l’espace à d’autres, on s’est aussi demandé : “est-ce que c’est toujours La Tresse ? ’’ Il fallait guider tout en gardant l’ouverture, c’était un challenge, mais ça nous a permis de définir encore davantage la signature de La Tresse », ajoute Laura Toma./p>  

Fondé en 2014, le collectif La Tresse a depuis fait plusieurs projets en salle ainsi que deux créations in situ. « C’est vraiment quelque chose qu’on avait envie d’explorer, mais dans lequel on a plongé un peu malgré nous, à cause de la pandémie, se rappelle Geneviève Boulet. Notre univers se prête très bien à la spontanéité, aux créations moins codifiées ». À travers cela, les trois artistes ont aussi développé un plus grand « goût de la nature ». « Nos anciennes recherches, nos résidences, et nos projets en extérieur ont beaucoup nourri KIN. On a vraiment amplifié notre rapport à l’environnement, au contact et au public », ajoute-t-elle. 

Notre gestuelle est souvent motivée par la sensualité, la sensorialité aussi. Il y a beaucoup de connexion avec nos corps créatures, nos fantasmes… on aime créer des mondes imaginaires et tripper sur le plaisir, l’absurde, la joie, l’instinct.

Libérée, mais précise

« Notre gestuelle est souvent motivée par la sensualité, la sensorialité aussi. Il y a beaucoup de connexion avec nos corps créatures, nos fantasmes… on aime créer des mondes imaginaires et tripper sur le plaisir, l’absurde, la joie, l’instinct », décrit Erin O’Loughlin en parlant de la patte spécifique et artistique du collectif. Selon elle, cette nouvelle création est venue « mettre en lumière » toutes ces caractéristiques.

Pour créer, La Tresse utilise toujours des systèmes d’improvisation. « Malgré cela, on est assez minutieuses et on arrive avec des propositions très chorégraphiées. On aime beaucoup polir le détail, être précis au niveau de l’intention du geste, c’est important pour nous », ajoute Geneviève Boulet. La voix prend aussi une place importante dans l’univers des trois danseuses. « Au début, on chantait simplement parce qu’on aime ça, mais maintenant, ça a plus de sens. On cherche la connexion que ça crée avec les vibrations, mais aussi l’aspect rituel que ça amène », explicite Erin O’Loughlin.

Éveiller la curiosité sensorielle

Pour KIN, les chorégraphes ont pensé construire un tout nouveau monde, aller ailleurs, mais finalement, cette première idée a rapidement disparu, comme l’explique Laura Toma. « C’était un enjeu d’imaginer un autre monde qui part de rien… wow… C’était trop de possibilité alors on est revenu sur la Terre et on a décidé de la penser autrement », se souvient-elle, amusée. Malgré cette envie terrestre, les trois cofondatrices du collectif ont décidé de créer des personnages. « On est des humains, on a des jambes, des yeux, etc., mais on est des êtres différents, un peu fantastiques », poursuit-elle.

Ainsi, pour cette nouvelle création, La Tresse a voulu « centraliser son regard sur la nature et tous les modes de communications qui existent sur terre entre les différents organismes ». « On veut offrir à voir différemment notre monde, comment c’est beau et toutes les choses qu’offre la nature », ajoute la danseuse.

Pour Erin O’Loughlin, KIN est un « zoom dans le microcosme », mais aussi une référence à la définition grecque du mot « apocalypse ». « Ça veut dire “révéler ce qui est caché’’, donc c’est un peu de comprendre ce qui est en dessous des choses, ce qu’on ne sait pas encore… Autre chose qui fait partie de notre oeuvre, c’est le concept de naissance, de renaissance, de cycle et de continuité », précise-t-elle.

Enfin, les trois créatrices ont voulu à travers cette proposition artistique offrir une « expérience immersive riche pour les sens ». « La scénographie est surdimensionnée, elle bouge avec nous, on joue sur les proportions de l’espace, conclut Geneviève Boulet. On veut que le public se sente enveloppé, que KIN éveille leurs sens, leur curiosité, que notre univers ne soit pas juste digéré par l’intellect, mais aussi absorbé par les corps, les sensations. »

KIN

Du collectif La Tresse. À l’Agora de la danse, du 19 au 22 avril.

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